Un 49-3 logique
*(Par Claude Barate, Universitaire constitutionnaliste, ancien député RPR des P-O)

 

Je n’ai pas aimé l’Emmanuel Macron qui s’est cru obligé de déclarer que la colonisation était un crime contre l’Humanité , je n’ai pas aimé qu’il déclare qu’il n’y avait pas de culture française, préférant sans doute le multiculturalisme et l’Europe fédérale à l’Europe des nations.

Bref, le moins que je puisse dire, c’est que je n’ai pas aimé cette démarche libertaire, jusqu’au jour où le COVID puis la guerre en Ukraine ont démontré qu’il fallait préserver l’indépendance des Nations.

Mais je ne vois pas au nom de quoi, je devrais m’ériger contre lui, lorsqu’il engage une politique indispensable pour sauver le régime des retraites par répartition, où les retraites sont payées par les actifs. J’ai déjà défendu le principe de l’allongement du temps de travail, pour rééquilibrer financièrement le système.

Je ne reviendrai donc pas sur la question.

Par contre, j’entends dire qu’il faudrait soumettre le sujet à référendum ! Bien sûr, et il aurait certainement fallu le faire avant de s’engager dans la voie législative : un vrai référendum d’orientation.

Non pas celui, ridicule, qui consisterait à demander aux français, s’ils sont pour ou contre la retraite à 64 ans.
Pourquoi pas leur demander s’ils la préfèrent à 50 ans…

Il ne s’agit pas de demander ce dont on a envie, mais de ce qu’on peut se payer.

Non, il aurait fallu, un référendum, qui leur demande si, pour équilibrer financièrement le système de répartition qu’ils défendent, ils préfèrent :

– Baisser les dépenses, en baissant le niveau des retraites, ce qui entrainerait une baisse du pouvoir d’achat des retraités,

– Augmenter les recettes, en augmentant la contribution des salariés ce qui entrainerait une baisse de leur pouvoir d’achat,

– Ou augmenter de deux ans le temps de travail, pour ne pas avoir à baisser le pouvoir d’achat des retraités ou celui des actifs.

– On aurait dû rajouter, si au nom de la justice sociale, il paraissait logique de laisser les régimes spéciaux, et eux seuls, en dehors de l’effort collectif.

Cette question posée avant le débat parlementaire, aurait eu l’avantage d’éclairer les Français et leurs parlementaires sur les choix réels de la Nation. Cela aurait permis également de faciliter, j’en suis persuadé, la mise en place de cette même réforme.

Aujourd’hui, le vote de la motion de censure sur le 49-3 a donné les résultats attendus : il n’y avait pas de majorité à l’Assemblée Nationale pour voter le texte, comme il n’y a pas de majorité pour censurer le gouvernement. En conséquence, le texte sur la réforme des retraites est adopté.

Faut-il s’offusquer de l’application d’un tel article pour adopter une loi ?

Outre le fait, que cette procédure législative est constitutionnelle, pour avoir été approuvée à une très large majorité par le peuple français, elle remplit dans le cas d’espèce le rôle qui lui est dévolu par la Constitution.

En effet cette procédure est prévue, dans le cadre de ce qu’on appelle le parlementarisme rationnalisé, pour permettre à un gouvernement de faire passer un texte d’intérêt supérieur, s’il estime que sa propre majorité est réticente à le voter. A fortiori lorsqu’il n’y a pas de majorité, ou une majorité relative, ce qui est le cas.

Ce qui est étonnant, c’est la réaction apparente des Français, qui paraissent critiquer, si l’on en croit les sondages, l’utilisation d’un tel article, pourtant adapté à un système de majorité relative, alors qu’ils sont favorables à un système d’élection législative à la proportionnelle, qui justement a pour résultat de ne pas dégager de majorité de gouvernement. Comprenne qui pourra !

Ou alors faut-il croire que les français démontrent une fois encore qu’ils détestent les effets de décisions dont ils adorent les causes !

 

Claude Barate.