(Vu sur la Toile)

 

Abaya : les états-majors écolos et Insoumis désavoués par leurs électeurs
(Article de Par Erwan Seznec • Rédaction hebdomadaire Le Point)

Le Point.- Vite, passons à autre chose ! Voilà probablement ce que vont se dire un certain nombre d’élus EELV et LFI en découvrant ce sondage* réalisé par l’IFOP pour Charlie Hebdo auprès de 2 145 personnes, les 30 et 31 août, dans le but de déterminer ce qu’elles pensaient de l’interdiction des abayas et des qamis à l’école ?

Annoncée le 27 août par le ministre de l’Éducation, Gabriel Attal, la décision a été précisée dans une note de service envoyée à tous les chefs d’établissement trois jours plus tard. Sont visées, les tenues « de type abaya ou qamis » qui manifestent « ostensiblement en milieu scolaire une appartenance religieuse ». Pour le jour de la rentrée, l’interdiction a été respectée, aucun incident n’a jusqu’à maintenant été signalé.

Cette mesure a pourtant valu à Gabriel Attal un tir de barrage de la gauche. « Les musulmans redeviennent une cible », écrit Jean-Luc Mélenchon sur son blog, dès le 28 août. Réglementation « dangereuse » et « cruelle », dénonce le lendemain Manuel Bompard, député et coordinateur de La France insoumise. Volonté inique de « contrôle social sur le corps des femmes et des jeunes filles », écrit sur X (ex-Twitter) Sandrine Rousseau, le même jour. La députée EELV de Paris fait l’impasse sur le qami, grande robe exclusivement masculine. À juste titre : les abayas représentent la grande majorité des cas signalés l’an dernier par les établissements scolaires. « Abayas, jupes, crop tops : c’est toujours le corps des femmes que ces politiques proposent de contrôler », renchérit le 29 août Sandrine Regol, députée EELV du Bas-Rhin.

Las, à en croire ce nouveau sondage IFOP, leur électorat n’est pas en phase. 58 % des sympathisants LFI approuvent l’interdiction, chiffre qui monte à 79 % chez les sympathisants EELV ! Ces derniers sont plus intransigeants sur ce sujet que les sympathisants PS (73 %). Les électeurs écologistes sont tout près de la moyenne nationale, qui rejette à 81 % l’abaya et le qami dans les collèges et les lycées.

Les hommes valident l’interdiction à 84 %, contre 77 % pour les femmes, manifestement peu sensibles à la thématique du contrôle social évoqué par Sandrine Rousseau. Âge, sexe, diplôme, sensibilité politique : quels que soient les filtres appliqués, aucune catégorie de sondés n’est favorable au port de ces tenues dans les établissements scolaires. Déjà basse, leur popularité s’érode, au moins chez les électeurs EELV. Dans un sondage IFOP-Fiducial pour Sud-Radio, réalisé à la mi-juin 2023, ils étaient 75 % seulement à vouloir les interdire à l’école. Quatre points de moins qu’en cette rentrée.

 

Un caractère religieux pour 7 sondés sur 10

Les sondés, par ailleurs, attribuent massivement (70 %) un caractère religieux à l’abaya et au qami. Les autres se partagent à parts égales (15 %) entre ceux qui n’ont pas d’avis et ceux qui pensent que ces tenues n’ont pas de caractère religieux. Sur ce point, l’électorat Insoumis se distingue nettement. 48 % des sympathisants LFI ne voient rien de religieux dans une abaya. Leur opinion se défend, c’est celle du Conseil français du culte musulman (CFCM) et de 41 % des sondés musulmans.

Néanmoins, comme le relève l’IFOP, les abayas vendues en ligne sur le marché français le sont avec un argumentaire religieux, huit fois sur dix (79 %). De plus, l’association qui a saisi le Conseil d’État en référé le premier septembre pour contester l’interdiction de l’abaya s’appelle « Action droits des musulmans. »

L’interdiction, selon cette association, « pourrait aboutir à l’exclusion de jeunes filles du système éducatif ». L’argument revient à admettre implicitement que franchir la grille d’un lycée en abaya a une forte charge symbolique. Qui, en France, menacerait de renoncer à l’école gratuite pour garder ses tongs ou son crop top, interdits dans de nombreux établissements ?

*Enquête menée auprès d’un échantillon de 2 145 personnes représentatif de la population âgée de 18 ans et plus vivant en France métropolitaine. Représentativité assurée par la méthode des quotas, questionnaire autoadministré en ligne du 30 au 31 août.

(Source Le Point)