Comme pour Tchernobyl, nous avons encore imaginé que le virus s’arrêterait à la frontière. Face à la crise bovine, la France manque encore de réactivité « il faut sauver nos paysans et nos paysages ! »

 

Un foyer de dermatose nodulaire contagieuse bovine (DNC) avait été confirmé le 4 octobre dans un élevage de veaux en Catalogne espagnole et cela à une trentaine de kilomètres de la frontière sur la commune de Castello d’Empuries…

Ce foyer avait conduit à la mise en place d’une zone de surveillance dans notre département des Pyrénées-Orientales sur environ 75 communes (informations du ministère de l’Agriculture en date du 4 octobre).

Alors que le ministère annonçait à cette date que la France disposait d’un stock suffisant de doses vaccinales pour cette campagne de vaccination, cela aurait dû déclencher une mobilisation exceptionnelle.

Pourtant, notre département des P-O s’est contenté d’un dispositif administratif classique : arrêtés préfectoraux, limitations de mouvements, vaccination progressive. Utile, certes. Suffisant, non. Car ailleurs, la réaction a été radicalement différente.

-L’Italie a immédiatement mis en place une unité de crise nationale, mobilisant vétérinaires sanitaires, renforts interrégionaux et même étudiants vétérinaires formés en urgence.

-L’Espagne, de son côté, a abattu rapidement les troupeaux infectés et mobilisé sans délai ses services vétérinaires régionaux.

Pendant ce temps, la France s’est interdite ce que d’autres ont osé : rappeler les vétérinaires retraités, solliciter les vétérinaires militaires, renforcer les brigades d’intervention rapide.

Nous disposons pourtant d’un vivier de compétences exceptionnel, mais largement sous-utilisé. Pourquoi hésiter à activer ce réservoir de professionnels capables de répondre en quelques heures à une crise qui s’est propage en quelques semaines? Pourquoi laisser la machine administrative l’emporter sur la logique opérationnelle ?

Il est temps que nos responsables politiques comprennent qu’une épizootie n’attend pas les délais d’un arrêté au Journal officiel.

La protection de notre cheptel, et donc de notre souveraineté alimentaire, exige une mobilisation totale et immédiate. Sans sursaut de réactivité, la France (et plus particulièrement les Pyrénées-Orientales) risque de rester spectatrice d’une crise qu’elle aurait pu mieux contenir.

 

 

Ce n’est pas acceptable d’abattre encore des troupeaux entiers, alors qu’il y a maintenant plus d’un mois que nous aurions pu vacciner l’ensemble des bovins du département. Ces gens ne se rendent pas compte le temps qu’il nous faudra pour reconstituer les troupeaux et un modèle économique qui préserve nos montagnes des incendies. En gardant chaque année les veaux et les vaches qui se portent le mieux dans nos montagnes, nous créons un troupeau naturellement adapté au terrain, au climat et aux ressources locales.

Si l’on abat tout d’un coup pour repartir de zéro, c’est une asphyxie et une incompréhension de notre passion de l’élevage. On perd cette adaptation précieuse : un nouveau troupeau mettra du temps à retrouver la même résistance et la même rusticité.

Une épizootie ne se gère pas depuis Paris, derrière un bureau. Elle se combat sur le terrain, avec des bottes, des gants, et des gens formés. Il serait temps que nos politiques se mettent au rythme de ceux qui vivent ici… Il faut cesser d’asphyxier nos campagnes, on n’en peut plus, il faut sauver nos paysans et nos paysages.

 

*Hubert Levaufre
Parc Pédagogique
La Ferme de Découverte Saint-André