(Vu sur la Toile)
« On me fait passer pour une racaille », dénonce Sébastien Delogu à son procès
(Article de De notre correspondant à Marseille, François Tonneau • Rédaction de l’hebdomadaire Le Point)
Le Point.- Le délibéré aura lieu vendredi 14 février au petit matin, jour de la Saint-Valentin. Un peu d’amour à attendre au tribunal correctionnel de Marseille pour Sébastien Delogu ? Rien de moins sûr. Appelé à comparaître ce mardi 7 janvier pour violences, le député Insoumis des quartiers nord de Marseille, devenu médiatique après avoir notamment brandi un drapeau palestinien dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, n’attend pas de clémence particulière. « On me fait passer pour une racaille sur tous les plateaux télé alors que je n’ai rien fait », se défend ce proche de Jean-Luc Mélenchon, né à la politique après avoir été chauffeur et garde du corps du leader de La France insoumise lorsque celui-ci était député sur le Vieux-Port, entre 2017 et 2022.
« La salle n’aurait pas été aussi pleine si Sébastien Delogu n’était pas un député de La France insoumise (LFi), l’homme à abattre de ces derniers mois », plaide son avocat, Yones Taguelmint, en avançant des arguments politiques et en replaçant les faits reprochés dans le méli-mélo de ce 17 mars 2023 où l’élu, écharpe en bandoulière, a été accusé d’avoir donné deux coups de pied à la CPE et au proviseur adjoint du lycée Saint-Exupéry, géant aux 1 700 élèves dans les quartiers Nord. « Tout est politique, la sévérité de la procédure, la réaction du rectorat, l’absence d’éléments objectifs dans les vidéos. On vient attirer l’opprobre (sic) sur mon client avec des conséquences monumentales », poursuit l’avocat, en soulignant le contexte des manifestations contre la réforme des retraites, où le prévenu était venu au soutien de salariés de l’usine Satys qui se trouve à cent mètres du lycée.
« La loi, c’est moi qui la fais ! »
Voyant des élèves de ce qu’on appelle aussi « le lycée Nord » à Marseille essayer d’organiser un blocus avec des poubelles, le député s’approche avec quelques grévistes en chasuble aux couleurs de la CGT. Dehors, des membres du personnel enseignant sont aux aguets, cherchant à empêcher le blocage. C’est en voyant un élève se faire ceinturer que le député décide d’intervenir. « J’étais tranquillement en observation, assure l’élu, cravate pourpre sur chemise blanche et costume sombre. Je suis venu en soutien à un lycéen qui était ceinturé, je voulais apaiser, trouver un consensus. J’étais choqué, excusez-moi si j’étais agacé. » Énervé au point d’avoir été filmé en train d’invectiver le proviseur adjoint. « Vous savez ce que c’est l’autorité ? lance-t-il sur les images projetées. Vous la voyez, l’écharpe ? Je suis le représentant du peuple ! La loi, c’est moi qui la fais ! »
L’Insoumis Delogu se défend de tout « antisémitisme » après avoir posté une vidéo polémiqueÉvidemment, la victime des propos met en parallèle la sortie enfiévrée avec celle de Jean-Luc Mélenchon sur le mode « La République, c’est moi ! » en octobre 2018, lors d’une perquisition au siège de son parti. Mais ce n’est pas cela qui le pousse à porter plainte. C’est une autre vidéo qui accuse Sébastien Delogu, même si les images ne sont pas flagrantes, d’avoir donné un coup de pied à la CPE et au proviseur adjoint qui s’en sont tirés avec quelques ecchymoses et une ITT d’un jour.
« Un coup de pied malheureux »
Diffusé dans la salle d’audience, le petit film montre bien des coups qui partent et une chaussure qui est considérée comme celle de l’élu. « J’ai été stupéfait de me faire frapper par quelqu’un qui est représentant de la République et a l’écharpe bleu blanc rouge, s’indigne l’adjoint. Cela fait vingt ans que je suis dans l’Éducation nationale, c’est ma première agression. » Tout aussi calme, la conseillère pédagogique se dit « sidérée, [elle] qui [s]e [bat] pour l’égalité des chances. [Elle a] porté plainte parce qu’il représente le peuple et la République ».
S’il reconnaît avoir « haussé le ton », Sébastien Delogu nie être l’auteur des faits. Mais une bande-son enregistrée sur France Bleu Provence juste après le coup de chaud, où il évoque « un coup de pied malheureux », le met en porte-à -faux. Alors que l’avocat des parties civiles, Matthieu Darmon, insiste en notant qu’il « existe plusieurs faisceaux d’indices, les images n’étaient pas connues au moment des plaintes et nous avons la véhémence avec laquelle il s’adresse à mes clients qui ont été constants dans leurs déclarations », le procureur Alain Berthomieu s’interroge : « Il est curieux qu’un consensus se recherche en vociférant. » Il insiste sur l’absence de reconnaissance des faits et revient sur l’exemplarité supposée du prévenu. « La démocratie n’a rien à gagner à ce genre d’attitude. » Observant que les faits reprochés auraient été commis par une personne chargée d’une mission de service public sur des personnes du même statut, qui plus est aux abords d’une cité scolaire, il requiert six mois de prison avec sursis et une amende de 1 000 euros.
(Source : journal Le Point)