Conte ou Cour des comptes…

 

 

La lecture du bulletin mensuel départemental de Madame la Présidente Malherbe** m’a transporté dans un univers irréel, celui des contes de mon enfance. Mon préféré était l’histoire des Milles et une Nuits avec le combat perpétuel de Shéhérazade condamnée à inventer un conte pour échapper au supplice et au jugement de la Cour des Contes qui, selon certains, serait à l’origine de la Cour des Comptes actuelle.

Autres temps, autres mœurs, on ne risque plus la décapitation, tout au plus une réprimande pour ceux qui mentent mal et un fauteuil sénatorial pour les plus doués. Mais ici, dans notre belle Occitanie, les élites ont été formées par le Grand Maître Georges Frêche dont la devise était « Mentez le plus possible et n’oubliez pas que plus c’est gros mieux ça passe ». C’est bien le cas dans le conte merveilleux dite du Quai Dezoums.

A quand remonte cette légende et d’où vient ce nom exotique ? A l’an 2000 ou à l’an 1000 ? Les contemporains ne connaissent que la plage des Tamarins, éventuellement le projet humoristique du 3e quai ; mais personne parle du Quai Dezoums. Mes recherches- qui méritent confirmation – apportent peut-être une explication. On connait la passion de la Présidente pour l’Histoire et l’Antiquité. Elle ne peut que connaître ce manuscrit poétique de la bibliothèque de Tolède qui effectivement évoque un lien entre la princesse Shéhérazade et un importateur de loukoums d’Afrique – une pâtisserie à base de fruits – qui opérait dit-on vers Portus Veneris. Ali Del Loukoums, Des Oums dit aussi Dezoums était tès riche. Il cachait son immense fortune sous la plage dite des Tamarins.

Mais les analogies ne s’arrêtent pas là. Notre Dez-Loukoums avait une forte complicité avec Shéhérazade, la fille du grand Vizir Iznogoud, dont le charme légendaire tenait beaucoup à ses talents pour raconter des histoires. Mais le plus extraordinaire est que ce petit royaume a connu une aventure prémonitoire proche de ce nous vivons… Selon un autre manuscrit arabe, dont je ne peux garantir l’origine, qui vaut la peine d’être traduit mot pour mot :

-« Il était une fois une princesse, fille du Calife Iznogoud, qu’elle chérissait plus que tout au monde, bien qu’il soit affecté d’aspirations de puissance et de domination fondées sur l’idée maladive de transformer son petit port en grande base navale, capable de vaincre les cités voisines de Seth, Mha-Silia et Bhar- Selhon.

Malheureusement les felouques d’Iznogoud ne pouvaient rivaliser avec les puissantes galères ennemies. Il fallait se rendre à une évidence que Shéhérazade se refusait d’admettre. Et durant de longues années elle fit tout pour cacher le trésor des Tamarins, des monceaux d’or et d’objets précieux, apportés par des orientaux du Liban, dits Phéniciens.

Shéhérazade qui raffolait des loukoums les prierait aux épaves antiques. Elle s’opposait aux habitants qui avaient le culte des Anciens et des vieilles pierres. Les juges du Califat lui donnèrent tort. De rage, elle conçut de rivaliser avec le grand monolithe de granit que l’on nommait l’Ohbélisk, qui trônait au centre du village. Elle fit construire un immense appareil, une sorte de grue deux fois plus haut que le monument des villageois, grand comme le plus haut des minarets de Damas. Hélas elle se trompa dans les unités de mesures.

On sait en effet que chaque pays avait les siennes. Pour les Romains, qui dominaient le monde, c’était le pied. Les orientaux préféraient la babouche. Dans son royaume la mesure obligatoire était le godillot.

Au montage de la grue ce fut catastrophe : elle était trop large pour les quais. Près de cinq millions de belles pièces d’or avaient été comme jetées à la mer. On avait décapité pour moins que ça dans le royaume !

Shéhérazade tenta de trouver un usage à l’engin. Mais le saut à l’élastique n’étant pas encore inventé, le saut à la pelote de laine tua trop de monde. On invita le muezzin à prendre de la hauteur, sans succès, il avait le vertige.

Comment faire oublier cette bévue. La logique recommandait de dégager les quais des magasins qui les encombraient. Mais la princesse eut l’idée inverse : modifier le port pour l’adapter à la grue ! Elle faisait d’une pierre deux coups. On construirait une esplanade à la gloire de Dezoums et de son père et on pourrait y promener la grue. Shéhérazade gagna le concours de l’histoire la plus cocasse du pays.

Son ami Dezoums se tourna vers un nouveau marché, bien plus juteux que les loukoums, la banane. Non seulement elle échappa au supplice mais elle gagna le concours du plus gros mensonge. Les courtisans n’y virent que du feu.

Quant aux trésors, elle les fit recouvrir pour que personne ne puisse y toucher. La dernière page du manuscrit manque. Aussi on ne sait si elle obtint son siège ou si elle termina sa vie en remboursant ce quelle avait coûté au royaume.

Quant à la morale de cette affaire, inutile de la chercher, ce mot n’existait pas en ces temps là.

 

*Jean-Claude Bisconte de Saint Julien (contribuable catalan)

**Hermeline Malherbe (PS), présidente du Conseil Départemental66, ex-sénatrice des P-O.

 

-Ce mardi 14 février 2023, une réunion d’information et de de débat public sur le sujet de l’avenir du port se tiendra, à Port-Vendres, à 18H 30, au Centre Culturel.