Depuis plusieurs jours circule dans les rues de Banyuls-sur-Mer une pétition lancée par un groupe de commerçants, pour demander “aux pouvoirs-publics de prendre les arrêtés municipaux nécessaires afin que les forces de l’ordre puissent interpeller et expulser les gens qui pratiquent la mendicité et le racolage sur la voie publique”, ainsi qu’exiger “la fermeture de l’accueil de nuit du foyer Saint-Joseph”.
Face à ce ras-le-bol exprimé par une partie de la population, Jean Rède (UMP), le maire de Banyuls-sur-Mer, a déjà répondu, par : le renforcement de la vidéo-protection dans la commune (actuellement deux caméras de surveillance fonctionnent, lors du vote du prochain budget un appel d’offres sera lancé pour renforcer cet équipement) ; la multiplication des contrôles qui sont effectués quotidiennement par la Police municipale et les gendarmes de la Brigade territoriale, même si l’élu admet que “mis à part les contrôles d’identité, faire respecter les arrêtés municipaux concernant la mendicité et la consommation d’alcool sur la voie publique, nous sommes hélas impuissants pour le reste”.
Le fait, dans cette pétition, qui exprime certes une réalité locale (mais qui n’est pas que locale, loin s’en faut !), que les auteurs aient pû pointer du doigt une institution historique telle que le foyer Saint-Joseph, a semé le trouble, la confusion et une certaine colère dans une autre partie de la population de Banyuls-sur-Mer qui regrette profondément “que soit fait un tel amalgame avec un lieu de vie qui permet justement d’apporter du calme dans le village”.
Géré par une association depuis sa création, il y a une soixantaine d’années (mis à part la Croix-Rouge c’est l’une des plus anciennes associations roussillonnaise à agir dans le secteur de la solidarité), le foyer Saint-Joseph de la rue Dugommier à Banyuls-sur-Mer est le départ historique dans l’implantation d’une congrégation religieuse française, “Les filles de Jésus”, qui a notamment assumé une présence et un rôle dans la vie sociale quotidienne de Port-Bou (de l’autre côté des Pyrénées, en Espagne), Port-Vendres et donc Banyuls-sur-Mer.
Au départ, “Les filles de Jésus” répondaient surtout aux besoins au jour le jour de la population : garde des enfants, cantine scolaire, accompagnement des mourrants…
Deux de ces religieuses ont marqué le territoire de la Côte Vermeille par une action particulièrement efficace solidement ancrée parmi les habitants : Soeur Benedicta et Soeur Sylvie. Cette dernière, disparue dans les années 90, décédée dans le foyer Saint-Joseph qu’elle n’a jamais voulu quitter jusqu’à son dernier souffle de vie, a même une plaque à son nom dans le village apposée dans le centre historique pour immortaliser son passage ici bas.
Car les anciens se souviennent encore de Soeur Sylvie relayant localement, avec force et courage, l’appel lancé par l’Abbé Pierre au coeur de l’hiver 1954. C’est d’ailleurs à partir de là , en suivant dans les années 1955-56, que tout a commencé pour la religieuse, qui s’était entourée d’une autre célébrité locale, le docteur Paul Boulignat, médecin de famille de Banyuls-sur-Mer, pour porter localement le destin de solidarité de sa communauté. Paul Boulignat avait accepté d’être à ses côtés dans l’association Saint-Joseph, en occupant les fonctions de trésorier.
Aujourd’hui, l’association Saint-Joseph gère in-situ trois structures : un centre d’hébergement et de réinsertion sociale, un centre d’hébergement d’urgence, et un centre médico-social pour l’accueil de personnes malades (mais qui ne sont pas au point d’être hospitalisées).
Au total, au travers d’une douzaine d’appartements (entièrement réhabilités), de studios et d’un dortoir (pour l’accueil de nuit uniquement), l’association Saint-Joseph offre une capacité d’accueil de 47 lits, emploie une vingtaine de salariés et fonctionne avec un budget annuel de 700 000 euros (“pour bien faire, il nous faudrait près d’un million d’euros”, reconnaît le président de l’association Saint-Joseph, André Centène).
Le Pôle Santé Dr. Boulignac (un service qui est abrité dans l’une des trois structures précédemment citées), est financé par l’ARS/ Languedoc-Roussillon (l’Agence Régionale de Santé) ; il permet l’accueil pour les personnes en précarité sur la communauté de communes Albères/ Côte Vermeille. Dans ce cadre là , l’Etat met à disposition un demi-poste d’infirmière, tandis que l’association Saint-Joseph rajoute un temps d’éductateur.
Le site, protégé par un environnement sécurisé, dans le centre-ville de Banyuls-sur-Mer, situé à peine à une centaine de mètres de la plage, permet aux femmes victimes de violences conjugales de venir s’y réfugier avec leurs enfants pour ensuite mener une vie protégée mais dans des conditions tout à fait normales.
Ce qui, aux yeux d’André Centène et de son directeur Marc Bukiet, “pose peut-être un problème, aux yeux d’une partie de la population, c’est l’Accueil de jour, en plus du setrvice “santé-précarité”. Ce service de jour est financé par la Fondation Abbé Pierre et le Conseil général des Pyrénées-Orientales. Or la population qui se dit inquiète doit être ici rassurée. L’Accueil de jour permet seulement aux SDF (Sans Domicile Fixe) de venir se laver, de prendre un café, de naviguer sur internet (deux ordinateurs sont à leur disposition), de rédiger un CV, etc. L’Accueil de jour ne fonctionne que de 9h à 12h 30. Contrairement à ce que la rumeur véhicule, nous ne les hébergeons pas”.
“NOUS CALMONS BANYULS !”
Pour André Centène il est très important de préciser que “cet Accueil de jour est indépendant des autres structures du foyer. Ceux qui le fréquentent ne sont pas mélangées aux familles qui y vivent. L’Accueil de jour a une entrée indépendante”.
Quant à l’Accueil de nuit, qui fonctionne en période hivernale, c’est un dortoir de 6 lits “pour mettre les gens à l’abri pendant une nuit seulement ou deux nuits s’il s’agit du week-end. Nous n’avons rien à voir avec le ras-le-bol exprimé à travers la pétition qui circule. Les habitants riverains du foyer Saint-Joseph le savent très bien, eux avec lesquels nous entretenons de bonnes relations de voisinage. Le phénomène de groupe, de bande, que la pétition dénonce ne nous concerne pas. Bien souvent, il s’agit de polytoxicomanes incontrôlables. Le maire a augmenté les effectifs de la Police municipale, s’apprête à installer de nouvelles caméras, les gendarmes font en amont un excellent travail… Chacun, dans son domaine de compétence, tente de relever le défi, en tout cas chacun agit… Les SDF que nous recevons à l’Accueil de jour sont eux parfaitement intégrés dans le village, on le voit bien, on les voit bien ! Ils fréquentent l’Accueil de jour du foyer comme ils fréquentent les cabinets médicaux, les supérettes… Pour les autres, les polytoxicomanes, même si nous étions fermés, même si nous n’existions plus, ils continueraient de vivre à Banyuls-sur-Mer. C’est ça la réalité. Ils dorment dans des squatts, dans les anciens locaux abandonnés du centre d’Elf-Aquitaine… Ce n’est pas le foyer Saint-Joseph qui les alimente. Nous comprenons la population locale, elle a le droit de se poser des questions, elle a le droit de colporter, mais ça ne correspond pas à la réalité ! Saint-Joseph est un lieu calme, apaisé, où nous n’acceptons pas la moindre violence. Tout individu qui se fait menaçant, agressif ne serait-ce que dans le verbe, est immédiatement mis à la porte du foyer. C’est écrit dans notre règlement et c’est affiché. Nous faisons un travail de fond vis-à -vis de cette population marginale et, contrairement à ce que dit la pétition qui se trompe de cible, nous calmons Banyuls !”.

André Centène et Marc Bukiet ont reçu hier après-midi l’épouse du maire de Banyuls-sur-Mer, Hélène Rède, accompagnée de deux adjoints de la Ville (à droite sur la photo), Antoine Torres, délégué à la Viticulture, au Commerce et à l’Artisanat, Nicole Come, déléguée aux Affaires sociales et aux Ecarts.
– A SUIVRE, DEMAIN…
BANYULS-SUR-MER, 2- LE SDF S’EST INSTALLé DANS UN CAVEAU DESAFFECTé…