(Vu sur la Toile)
Elections législatives : 22 destins sur un fil pour le 2e tour
(Article de Par Marin Paulay, Ludovic Vigogne et Caroline Vigoureux • Rédaction du journal La Tribune)
Rédaction du journal La Tribune
Emmanuelle Ménard
Tuée par Le Pen ?
Députée de la 6e circonscription de l’Hérault depuis 2017, l’épouse du maire de Béziers entretient des relations exécrables avec Marine Le Pen. Elle pourrait le payer. Le RN a présenté cette fois-ci un candidat contre elle, qui l’a largement dépassée au premier tour, avec 41% des voix, contre 27,2% pour elle. En 2022, Emmanuelle Ménard avait réuni 45,8% des voix au premier tour et presque 70% au second. Cette fois, cela s’annonce très compliqué. Outre le candidat RN, la représentante du Nouveau Front populaire reste également en lice.
Olivier Véran
Le dernier macroniste d’Isère ?
L’ancien porte-parole du gouvernement Borne est en ballottage défavorable dans la 1re circonscription de l’Isère. Avec 33,6% des voix au premier tour, il a été devancé par le candidat Nouveau Front populaire, issu de LFI, qui en a récolté 40,2%. Olivier Véran sera-t-il en mesure de refaire son retard, alors qu’il affronte une triangulaire puisque le candidat RN s’est lui aussi qualifié, avec 18,3% des voix ? La survie du macronisme en Isère dépendra de son sort. Ce département était autrefois une place forte de la majorité présidentielle avec 9 députés sur 10 en 2017. Il n’y en aura plus aucun s’il échoue.
Stanislas Guerini
Paris, c’est fini ?
Le ministre de la Fonction publique pourra-t-il rattraper son retard dans la 3e circonscription de Paris ? Lors du premier tour, Stanislas Guerini, qui en est le député depuis 2017, a obtenu 34% contre 46,1% en faveur de son adversaire Nouveau Front populaire, Léa Balage El Mariky. À Paris, la gauche a le vent en poupe. Si elle se partageait la capitale avec le camp présidentiel, l’avantage tourne désormais en sa faveur. Dimanche, elle a déjà repris la 7e circonscription dès le premier tour avec la victoire d’Emmanuel Grégoire, le premier adjoint d’Anne Hidalgo, sur l’ex-ministre et député Renaissance sortant Clément Beaune. Ce dimanche, la Macronie pourrait également perdre la 11e circonscription, détenue par la députée MoDem Maud Gatel.
François Hollande
Un trou de souris entre RN et LR
La situation n’est pas si confortable qu’attendu pour l’ancien président, qui a décidé de revenir au combat politique dans son fief de Corrèze. Il se retrouve dans une triangulaire face à une candidate RN qui a obtenu 30,9% des voix au premier tour, en deuxième position derrière lui (37,6%). Un score inédit sur ces terres où l’extrême droite n’avait jusqu’alors jamais percé. Arrivé en troisième position, le député LR sortant, Francis Dubois (28,6%), a décidé de se maintenir, soutenu par la majorité présidentielle. Sa présence pourrait être favorable au socialiste, qui bénéficie toujours d’un ancrage local fort à Tulle, où il a été député durant près de vingt ans, maire pendant près de sept ans, et où il possède toujours une maison.
Sarah El Haïry
Une ministre à la peine
La ministre déléguée à l’Enfance et à la Famille mène une bataille très serrée dans la 5e circonscription de Loire-Atlantique. Avec 36,1% des voix, elle a été devancée au premier tour par le candidat du Nouveau Front populaire (37,7%). Sarah El Haïry doit composer au second avec une triangulaire, puisque le candidat LR-RN s’est également qualifié (24,7%). Élue de cette circonscription depuis 2017, la MoDem devra aller chercher du côté des abstentionnistes si elle veut l’emporter.
Valérie Rabault
Distancée par le RN
Le sort de cette figure reconnue de l’Assemblée nationale est particulièrement incertain. La députée du Tarn-et-Garonne depuis 2012 a été devancée de 4 501 voix par la candidate RN-LR, la maire de Montauban, Brigitte Barèges, qu’elle affronte en duel pour le second tour. Arrivera-t-elle à les rattraper ? La candidate Renaissance, éliminée au premier tour, a appelé à voter pour cette experte des questions budgétaires mais la marche est haute pour battre le parti de Marine Le Pen, qui a loupé de quelques points une victoire dès le premier tour. Son cas sera particulièrement scruté puisqu’elle fait partie des noms cités pour Matignon si Emmanuel Macron avait à se tourner vers un représentant du Nouveau Front populaire. Dans ce cas de figure, elle a déjà sous-entendu qu’elle accepterait le poste, par la formule consacrée : « Je prendrai mes responsabilités. » Le président du groupe socialiste au Palais-Bourbon, Boris Vallaud, se retrouve lui aussi en duel face au RN mais dans une situation moins risquée dans la 3e circonscription des Landes, puisqu’il a devancé la candidate lepéniste de 1,5 point au premier tour.
François Ruffin
Un « boulet » au pied
Le député de la Somme le savait. Il avait bien senti que sur ses terres le RN était plus haut que jamais. Son voisin de circonscription le député RN Jean-Philippe Tanguy a d’ailleurs loupé de très peu l’élection dès le premier tour. Lui a un retard de 7 points à combler face au RN pour l’emporter (33,9% contre 40,7%) ce dimanche. Arrivée en troisième position, la candidate macroniste s’est désistée, appelant à voter pour celui qui a rompu avec Jean-Luc Mélenchon quelques jours avant le premier tour et le considère comme « un boulet ». Ce soutien pourrait lui permettre de l’emporter mais le match est serré dans ces derniers jours de campagne, que François Ruffin appelle le « money time ».
Olivier Marleix
Spécimen en péril
Le président du groupe LR à l’Assemblée nationale a connu un très mauvais premier tour dans la 2e circonscription d’Eure-et-Loir. Il n’y a décroché que 25,9% des voix, alors que le candidat RN récoltait 38,2%. Arrivée en troisième position avec 25,6%, la candidate du Nouveau Front populaire s’est désistée pour le second tour. Celui qui est élu sur cette terre depuis 2012 arrivera-t-il à retourner la situation en sa faveur ? Son cas est révélateur de la grande difficulté des députés LR sortants dans cette élection. Dans les Hauts-de-France ou le Grand-Est, ceux-ci ont également été très largement distancés par les candidats du RN. Le groupe LR, qui comptait 61 députés, ne devrait plus en réunir qu’une petite quarantaine à l’issue des législatives.
Élisabeth Borne
Sauvée par la gauche ?
Comme en 2022, la campagne législative se jouera jusqu’à la dernière minute pour Élisabeth Borne dans la 6e circonscription du Calvados. Lors de son baptême du feu, elle avait été élue de justesse quelques semaines après sa nomination au poste de Première ministre. Arrivée en tête lors des deux tours il y a deux ans, elle accuse cette fois-ci un retard important (36,2% contre 28,9%) sur son adversaire du Rassemblement national, Nicolas Calbrix. Elle pourra tout de même bénéficier du retrait du candidat du Nouveau Front populaire arrivé en troisième position, Noé Gauchard (23,2%), pour effacer son retard et espérer revenir à l’Assemblée, où elle s’est montrée très investie depuis février et son départ de Matignon.
Rachel Keke
Duel tendu avec une figure LR
C’était l’une des figures que La France insoumise avait mises en avant lorsque le parti de Jean-Luc Mélenchon se vantait d’avoir 75 élus dans l’Assemblée nationale de 2022. Rachel Keke, ancienne femme de chambre, meneuse de la grève à l’hôtel Ibis-Batignolles, avait décroché en 2022 la 7e circonscription du Val-de-Marne, traditionnellement ancrée à droite, face à l’ancienne ministre des Sports Roxana Maracineanu. Cette fois, c’est le LR Vincent Jeanbrun, maire de L’Haÿ-les-Roses, qui a vu son domicile attaqué lors des émeutes de juillet dernier, qu’elle devra affronter. L’élu est arrivé en seconde position derrière elle, avec 34,6% des voix contre 43,6% pour l’Insoumise, mais il pourrait bénéficier du report de voix du candidat RN. Rachel Keke est l’un des rares éléments de LFI à être en grande difficulté. Ils sont vingt députés Insoumis à avoir été élus dès le premier tour, parmi lesquels les plus proches de Jean- Luc Mélenchon, comme Manuel Bompard, Sophia Chikirou, Clémence Guetté ou encore Paul Vannier.
Michèle Tabarot
Face à la dynamique Ciotti
Cela a été une surprise du premier tour : indéboulonnable députée de la 9e circonscription des Alpes-Maritimes depuis 2002, Michèle Tabarot est en difficulté dans son fief. La présidente de la commission d’investiture de LR a été devancée par le candidat RN, qui a obtenu 42,3% contre 33,8% pour elle. Dans les Alpes-Maritimes, l’alliance nouée par Éric Ciotti avec le Rassemblement national a eu un impact majeur. Ces terres sont en effet celles du patron des Républicains, en passe d’être réélu facilement dans la 1re circonscription. Les candidats RN et LR tendance Ciotti pourraient ainsi emporter les neuf circonscriptions du département.
Raphaël Arnault
L’antifa face au RN
La candidature de Raphaël Arnault, antifa fiché S, dans la 1re circonscription du Vaucluse au nom du Nouveau Front populaire (il a été désigné sur le quota LFI) a provoqué une vive polémique. Le fondateur de l’organisation radicale la Jeune Garde a obtenu 24,7% au premier tour. Il affrontera au second tour la députée RN sortante Catherine Jaouen, qui a récolté 34,6% dimanche et part favorite. À l’issue du scrutin, le Rassemblement national pourrait remporter les cinq circonscriptions du département.
Aurélien Rousseau
Face à son ancien camp
Passé de la Macronie au Nouveau Front populaire, Aurélien Rousseau est arrivé en tête du premier tour dans la 7e circonscription des Yvelines (34,6%). L’ancien ministre de la Santé se retrouve désormais dans une triangulaire, où il devra affronter une autre ancienne ministre macroniste, Nadia Hai, arrivée en deuxième position (29,3%) mais aussi Babette de Rozières, qui a obtenu 25,7% des voix sous l’étiquette LR-RN. L’ex- directeur de cabinet d’Élisabeth Borne était en contact avec les dirigeants du PS depuis son départ du gouvernement à la suite du vote de la loi immigration. Il a été investi sur le quota de Place publique, le parti de Raphaël Glucksmann, sur cette terre qui était autrefois celle de Michel Rocard.
Guilhem Carayon
Dans les pas de Ciotti et de son père
Il est le premier à avoir suivi Éric Ciotti dans son alliance avec le Rassemblement national, et ce choix pourrait lui réussir. Le président des Jeunes Républicains a profité de l’absence de candidat RN pour sortir en tête au premier tour dans la 3e circonscription du Tarn avec 43,5% des voix, devant le député sortant Renaissance Jean Terlier (28,6%). Le candidat du Nouveau Front populaire, Julien Lassalle (25,3%), s’est quant à lui désisté pour faire barrage à l’alliance RN-LR. Guilhem Carayon a donc l’occasion de marcher sur les traces de son père, Bernard, maire de Lavaur et député de cette circonscription sous la bannière du RPR de 1993 à 1997 puis de l’UMP de 2002 à 2012.
Éric Woerth
L’Oise 100% RN ?
L’ancien ministre sarkozyste, qui a rallié le camp macroniste en 2022, a enregistré 29,8% des voix dimanche dernier dans la 4e circonscription de l’Oise. Sous les couleurs de Renaissance, il a été devancé par un candidat RN qui a réuni 40,2% des suffrages. Éric Woerth est député de cette terre depuis 2002. S’il échoue, les sept circonscriptions de l’Oise devraient passer au RN.
Alexis Corbière
Voyage en absurdie
Les frondeurs Insoumis résisteront-ils ? À Bagnolet, Alexis Corbière est arrivé en première position au premier tour, avec 40,2% des voix, devant la candidate soutenue par tout l’état-major de La France insoumise, Sabrina Ali Benali (36,4%). C’est donc un duel fratricide, dans lequel les prétendants défendent le même programme du Nouveau Front populaire, qui se joue pour le second tour. Candidate à Montreuil, Raquel Garrido, autre frondeuse de LFI s’est, elle, désistée après être arrivée en troisième position dans la 5e circonscription de Seine-Saint-Denis alors que le candidat investi par LFI, Aly Diouara, est arrivé en tête. À Paris, dans la 15e circonscription, Danièle Simonnet est en ballottage favorable après être arrivée largement en tête au premier tour, devant la candidate soutenue par LFI, Céline Verzeletti. Un autre duel entre gauches similaires, symptomatique des règlements de comptes internes qui traversent LFI et qui donnent lieu à des situations absurdes.
Charles-Amédée de Courson
Liot mal en point
Clap de fin pour le député de la 5e circonscription de la Marne depuis 1993 (trente et un ans !) ? Charles-Amédée de Courson est en ballottage défavorable face à un candidat RN. Avec 42,6%, il est devancé de 4,3 points par son adversaire. À l’Assemblée, Charles-Amédée de Courson est membre du groupe Liot, qui regroupe des Corses, des centristes, des Ultramarins et des régionalistes. Celui-ci comptait vingt-deux membres. Il sortira amoindri de ces législatives anticipées. Son président, Bernard Pancher, est ainsi en ballottage très difficile dans la 1re circonscription de la Meuse, où il est lui aussi très largement devancé par le RN.
Sacha Houlié
Défié par la gauche et le RN
Représentant de l’aile gauche de la Macronie, Sacha Houlié est favori pour sa réélection dans la 2e circonscription de la Vienne, mais la victoire n’est pas assurée. Il est sorti en première position au premier tour, d’une courte tête, avec 33,2%, face aux candidates du Nouveau Front populaire (28,6%) et du Rassemblement national (24,4%). Une triangulaire qui peut donc être favorable au fondateur des Jeunes avec Macron, mais la bataille devrait être rude pour celui qui s’est fait très discret ces derniers temps.
Agnès Pannier-Runacher
Un retard impossible à combler ?
Ministre d’Emmanuel Macron depuis 2018, elle fait partie des proches du président en difficulté dans cette élection. Dans la 2e circonscription du Pas-de-Calais, qui avait choisi un député Ensemble en 2022, Agnès Pannier-Runacher a obtenu 21,5% des suffrages, soit 16 points de moins que son rival RN, Alban Heusèle. Une situation délicate pour l’actuelle ministre déléguée à l’Agriculture, qui peut cependant espérer un report de voix du candidat NFP, Alexandre Cousin, qui s’est désisté (il a obtenu 20,1%). La non-qualification du candidat divers-centre, Nicolas Desfachelle, peut aussi constituer une réserve de votes décisive (13,9%). Si Agnès Pannier-Runacher n’est pas élue, le Pas-de-Calais ne comptera plus de représentant macroniste.
Nicolas Dupont-Aignan
Le combat de trop
Député de la 8e circonscription de l’Essonne depuis 1997, le triple candidat à la présidentielle est en ballottage pour ce second tour. Avec deux points de moins que le candidat Nouveau Front populaire, Bérenger Cernon (34,3% contre 32,9% au premier tour), le patron de Debout la France se retrouve dans une triangulaire avec le président LR du conseil départemental, François Durovray (27,3%). Cet habitué de la salle des Quatre-Colonnes du Palais-Bourbon avait fait alliance avec Marine Le Pen en 2017 avant de faire machine arrière.
Sébastien Jumel
Éviter la noyade du PCF
Son cas est symptomatique de la grande difficulté que rencontrent les communistes dans cette élection. Alors que le chef du PCF, Fabien Roussel, a été éliminé dès le premier tour dans le Nord, Sébastien Jumel, bien connu à l’Assemblée nationale, n’est pas passé loin non plus dans sa circonscription de Seine-Maritime. Le candidat RN y a obtenu 44,9% des voix au premier tour contre 34,5% pour lui. « Il y a une vague brune qui s’abat sur nous », a reconnu celui qui a été élu pour la première fois en 2017. Mais il pourrait récolter des voix à droite, ayant reçu les soutiens inattendus de Xavier Bertrand et de Gérald Darmanin. Son collègue communiste Pierre Dharréville mène aussi une bataille compliquée dans les Bouches-du-Rhône face au RN, qui l’a devancé de 11 points au premier tour.
Laurent Wauquiez
Le chemin de croix
La campagne n’aura finalement pas été une promenade de santé pour ce ténor de la droite, pourtant dans un fief qu’il connaît bien. Dans la 1re circonscription de la Haute- Loire, qui comprend une partie de la ville dont il a été le maire de 2008 à 2016, Le Puy-en-Velay, le président du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes est sorti de justesse en tête au premier tour. Avec 36,8%, contre 34,1% pour Alexandre Heuzey (RN), qu’il affrontera en duel, il pourra cependant compter sur un report des voix de la candidate MoDem (9,4%) pour conforter son avance. Le désistement de la candidate écologiste du NFP, Celline Gacon, pourrait également lui profiter, bien qu’elle n’ait pas appelé à voter pour l’ancien président des Républicains.
(Source La Tribune)