(Vu sur la Toile)

 

Face aux canicules qui se multiplient, ces villes seront bientôt les seuls refuges respirables en France
(Article de Eléonore Bounhiol • Rédaction du magazine Maison & Travaux)

 

Maison & Travaux.- Alors que la France subit de plus en plus de vagues de chaleur, ces régions pourraient bientôt devenir les derniers refuges supportables en été…

On le voit, alors que seize départements de l’Hexagone ont été placés en vigilance rouge par Météo France le 1er juillet 2025 : la canicule impose de nouveau défis majeurs en France. Températures extrêmes de plus en plus fréquentes, records de chaleur, et dispositifs d’urgence en pleine évolution : le réchauffement climatique va probablement rebattre les cartes démographiques dans les prochaines années. Quelles zones du territoire restent (et resteront) encore “fraîches” et lesquelles seront bientôt métamorphosées en four géant ?

 

 

Le réchauffement climatique, une réalité qui inquiète

 

Le constat est sans appel : les étés se réchauffent de façon accélérée. Selon le ministère français du Développement durable, la trajectoire actuelle projette une hausse moyenne des températures de +2 °C d’ici 2030, +2,7 °C en 2050, et +4 °C à l’horizon 2100 en métropole . Cette année, les effets sont difficiles à nier, alors que le pays traverse, début juillet, une vague de canicule exceptionnelle.

Météo-France confirme : la période juillet‑septembre 2025 a 60 % de chances d’être plus chaude que la normale, avec un à deux degrés au-dessus des moyennes saisonnières. L’indice Climate Shift Index montre quant à lui que le dernier épisode caniculaire dans l’Hexagone était 8 à 11 °C au-dessus de la normale dans le sud, renforcé par un “dôme de chaleur”. Des conditions exceptionnelles, mais de moins en moins rares… Avec des conséquences humaines graves : la chaleur extrême est responsable de près de 480  000 décès par an en Europe, selon Swiss Re.

 

 

En France : quels sont les villes et les endroits les plus “frais” ?

 

Où s’installer ou séjourner pour éviter les coups de chaud à l’avenir ? Première idée : en altitude, où la fraîcheur est garantie (encore pour quelques années). Les zones de montagne comme les Alpes, les Pyrénées, le Massif central, le Jura ou les Vosges présentent des températures estivales globalement plus modérées. Par exemple, à Briançon (1 326 m), la température moyenne estivale tourne autour de 20 °C, et les nuits restent fraîches, avec des minimales souvent inférieures à 10 °C même en juillet. L’altitude agit comme un amortisseur thermique naturel : selon l’ADEME, on perd 0,65 °C tous les 100 mètres en s’élevant. Cela permet à certaines stations de moyenne montagne (entre 800 et 1 500 m) de rester en dessous du seuil des fortes chaleurs (35 °C), même lors des vagues caniculaires. Un rapport du Conseil économique, social et environnemental (CESE) publié en 2023 sur l’adaptation de la montagne au climat note d’ailleurs que ces territoires seront de plus en plus recherchés pour leur fraîcheur estivale et leur confort thermique.

Ensuite, les forêts sont de vrais ilots de fraîcheur à la régulation naturelle ! En milieu rural ou périurbain, elles jouent un rôle de climatiseur naturel. Une étude du CNRS et de l’INRAE a même montré que dans les forêts tempérées françaises, la température ambiante peut être abaissée de 2 à 4 °C en journée, grâce à l’ombrage, l’évapotranspiration et l’humidité relative plus élevée. Les forêts d’altitude, comme celles du Vercors, de l’Aubrac ou des Pyrénées, cumulent ainsi deux avantages : altitude et couverture végétale. Des zones comme le plateau de Millevaches (Limousin), la forêt de Tronçais (Allier) ou les Cévennes sont ainsi citées parmi les futurs “havres climatiques” dans des cartographies prospectives réalisées par Météo-France et le CEREMA.

Du côté des villes, Charleville‑Mézières (Ardennes), avec une température moyenne annuelle de 10 °C, est encore l’une des villes les plus fraîche de France. Le climat y est continental : des étés parfois chauds, mais où les nuits peuvent descendre sous 5 °C, même en juillet. Située en vallée sous les Puys, Clermont-Ferrand connait aussi des étés chauds (> 35 °C), mais sa position en vallée crée de fortes inversions thermiques nocturnes, modérant les afflux de chaleur. Plus au Sud, et malgré son climat méditerranéen, Menton bénéficie d’influences de type “Csb” : ventilations marines et reliefs alpins limitent les excès, et ses températures d’été restent souvent sous les 32 °C . Enfin, des observatoires comme LCZ (Cerema) et CartoClimate montrent que de nombreuses zones périurbaines et rurales dans le Nord-Ouest de la France, notamment autour de Lille, de la Bretagne et de la Normandie, présentent une sensibilité faible aux îlots de chaleur urbain.

 

 

Îlots de fraîcheur en France : attention à la pression foncière à venir

 

Mais il y a un revers, ou plutôt, un prix à payer pour rester au frais : ces refuges climatiques risquent toutefois d’attirer de nouvelles populations en quête de fraîcheur et de confort thermique, dans les prochaines années et prochaines décennies. Des chercheurs du CNRS parlent déjà de “migrations climatiques intérieures”, avec un afflux vers les moyennes montagnes, les zones boisées et les territoires encore tempérés.

Ce phénomène pourrait poser des défis majeurs : préservation des écosystèmes, accès à l’eau, urbanisation maîtrisée… Car ces refuges naturels pourraient vite perdre leur rôle s’ils sont trop sollicités ! Dans les décennies à venir, même ces zones devront s’adapter à une France plus chaude.

 

 

Les zones de l’Hexagone où il risque de faire chaud, très chaud dans quelques années

 

À l’inverse, plusieurs régions française n’échapperont pas au réchauffement, et pourraient devenir “invivables” à l’horizon 2050 et 2100. Par exemple :

-Le Sud-Est et la plaine méditerranéenne : des villes comme Hyères et Marseille affichent des étés régulièrement très chauds (> 30 °C), avec des records dépassant les 40 °C, et peu de nuits fraîches.

-Les grandes agglomérations densément construites : les zones urbaines comme Paris, Lyon, Nice ou Toulouse sont particulièrement exposées ! Elles subissent de puissants îlots de chaleur urbains, et des alertes canicule s’y succèdent régulièrement depuis plusieurs années.

-L’Est continental : avec ses influences continentales, la région Grand Est (Strasbourg, Alsace) devrait connaître des étés plus courts mais plus intenses, avec des températures diurnes en forte hausse et un rythme accru des vagues de chaleur.

Une chose est sûre : il va falloir s’adapter ! L’enjeu, dès aujourd’hui, reste d’orienter les politiques d’urbanisme et d’aménagement pour gagner en fraîcheur : végétalisation, densification maîtrisée ou relocalisation progressive vers ces futurs “refuges climatiques”… Pour que le pays reste vivable face aux étés à venir.

(Source : magazine Maison & Travaux)