Tribune Libre/ Claude Barate* : “En défense de l’Etat de droit”
par adminLuc le Oct 1, 2025 • 16 h 11 min Aucun commentaire*Par Claude Barate, universitaire, député honoraire
En démocratie, l’état de droit est indispensable pour protéger les hommes de l’arbitraire qu’ils subissent dans les dictatures ou les régimes autoritaires. En France, cette mission est dévolue à une autorité administrative indépendante, la justice. (Pour être un pouvoir, il faudrait que les juges soient élus par le peuple, ce qui n’est pas le cas)
C’est pourquoi, je suis d’accord avec le président de la cour d’appel de Paris qui demande, solennellement, que l’institution judiciaire soit respectée, et je condamne les menaces à l’encontre de magistrats qui exercent un métier très difficile.
Ceci dit, si la justice est organisée en plusieurs degrés de juridiction, c’est parce qu’elle admet elle-même qu’elle peut se tromper. C’est pour cela que l’appel existe !
S’il n’est pas acceptable de critiquer les juges, rien n’interdit de critiquer éventuellement leurs jugements.
C’est à l’aune de ces principes que j’ai analysé la condamnation qui vient de frapper mon ami Nicolas Sarkozy.
Bien sûr, parce que je suis un ami, mon analyse est vraisemblablement subjective, mais ni plus ni moins que celle des juges. Parce que je connais l’homme, même sans connaître le dossier, je n’ai jamais cru à cette fable. Ce serait porter atteinte à l’intelligence de Nicola Sarkozy que de croire qu’il aurait pu rechercher auprès d’un homme sulfureux un quelconque financement et rester ainsi sous sa coupe. Comment imaginer que s’il avait été sous sa coupe, il aurait pu quelques années plus tard s’opposer par les armes à lui dans le but de protéger le peuple libyen. Si Mouammar Kadhafi avait financé Nicolas Sarkozy, il n’aurait pas manqué de le dénoncer !
Mais, puisqu’au terme d’une longue enquête, il y avait procès, j’ai souhaité en analyser les termes.
Dans les réquisitions du Parquet National Financier, il y avait quatre accusations : une portait sur le détournement de fonds publics libyens, une autre sur un supposé pacte de corruption, un autre sur le financement illégal de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007, enfin le dernier venait coiffer le tout en déclarant association de malfaiteurs les personnes qui avaient soi-disant organisé le tout.
Il résulte du jugement même du tribunal correctionnel de Paris, qu’aucun élément, malgré douze ans d’enquêtes, n’est venu apporter la moindre preuve sur les trois premiers chefs d’accusation du parquet financier. Et le tribunal d’en conclure logiquement, qu’il n’y a pas eu de détournement de fonds publics libyens, qu’il n’y a pas eu de pacte de corruption, qu’il n’y a pas eu de financement illégal de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.
La présidente dira même, qu’après analyse des patrimoines de Nicolas Sarkozy et de sa famille, il n’y a eu aucun enrichissement personnel, et que le premier document d’accusation publié par Médiapart était un faux !
Tout le monde pouvait penser que puisque toutes les accusations portées par le parquet national financier, n’avaient aucune existence réelle, le tribunal prononcerait une relaxe de l’inculpé.
Pas du tout, le tribunal a décidé de condamner Nicolas Sarkozy pour des faits qui d’après lui sont extrêmement graves et constitutifs du délit d’association de malfaiteurs.
Comprenne qui pourra : Il n’y a eu aucun délit commis mais une association de malfaiteurs aurait pensé à les commettre !
Existerait-il des preuves de cette volonté de commettre ces délits ? Non, mais le tribunal estime que malgré tout cela a pu exister et que Nicolas Sarkozy ne pouvait pas ne pas savoir !!
Cela veut dire que conditionné par les réquisitions du parquet et le faux document publié par Médiapart, le tribunal, sans aucune preuve ou début de preuve de quelque nature que ce soit, condamne à cinq ans d’emprisonnement une personne, à fortiori un ancien président de la république.
Où va-t-on ? Où est le principe de la charge de la preuve qui doit porter sur l’accusateur ?
Où est celui de la présomption d’innocence ? Où est le principe du bénéfice du doute ?
Où est le droit d’appel lorsque le tribunal impose une exécution provisoire par un mandat d’arrêt, alors qu’il n’y a pas risque de récidive ou de fuite à l’étranger avant l’appel ?
Ces principes intangibles, pourtant partenaires de l’état de droit, paraissent ne pas avoir été respectés !
Ce sont toutes ces questions que se pose le peuple de France. Ce n’est pas un problème de droite ou de gauche, c’est un problème d’application, apparemment arbitraire, de la justice.
Parce que le jugement ne me parait pas cohérent, il me parait hautement contestable : La contrepartie de l’indépendance de la justice, doit être son impartialité”.
*Par Claude Barate, universitaire, député honoraire