Hier soir, lors de la traditionnelle cérémonie des voeux du Nouvel An aux militants et sympathisants de la fédération départementale du parti Les Républicains des P-O (LR66), qui avait lieu à Canet-en-Roussillon, le sénateur François Calvet a fait ses adieux en annonçant qu’il se retirerait de la scène politique à la fin de l’été 2023, c’est-à-dire au terme de son mandat de parlementaire en cours*… Et ce n’est pas un Poisson d’Avril (il est né un 1er avril à Perpignan)

 

Hier soir, à Canet-en-Roussillon : derrière Christine Gavalda-Moulenat, présidente de la fédération départementale du parti les Républicains des P-O (LR66) au pupitre, le sénateur François Calvet ému aux larmes.

 

C’est dans une ambiance empreinte d’une réelle émotion et sous une pluie d’hommages – discours des élus se succédant à la tribune et applaudissements dans une salle bondée – que l’ancien député-maire du Soler, l’ancien conseiller régional, l’ancien 1er vice président de la métropole Perpignan-Méditerranée, etc.-etc., François Calvet pour ne pas le nommer, a en quelque sorte officialisé son retrait de la scène politique, même si il y a de longs mois en arrière de là il s’en était déjà confié à notre rédaction.

Son premier mandat, c’est celui de conseiller régional, en 1992, aux côtés du président de la Région Languedoc-Roussillon, le lozérien Jacques Blanc, sous les couleurs de l’UDF-PR (Parti Républicain) ; jusqu’en 2002. De 1995 à octobre 2017, il est maire du Soler. De 2002 à 2011, il est député de la 3e circonscription, avant de choisir la voie du Sénat, où il siège depuis maintenant plus de 11 ans et quatre mois…

Au regard de sa longévité en politique, à ses responsabilités et à la diversité de ses mandats locaux ainsi que nationaux, il aura connu deux défaites** qui ne l’auront pas empêché de rebondir spectaculairement. Cela fait plus de trente ans qu’il est incontournable sur le sol roussillonnais, il connait les moindres recoins du territoire et du système. C’est sans aucun doute grâce à cette parfaite maîtrise de l’air du temps ambiant, en Pays catalan, qu’il a réussi à se faufiler, à exister, à s’imposer, à se réinventer contre tramontane et étangs : il a su s’appuyer sur les traditions locales qui, comme lui, ont survécu aux philosophies, aux morales, aux “régimes” et même aux techniques.

Certes, des coups il en a pris. Il en a rendu aussi. Il en a également donné, bien sûr. Entre nous, on pense même qu’il se faisait un malin plaisir de jeter de l’huile sur le feu, parfois, histoire de brouiller les pistes. Quitte à se cantonner ensuite dans une prudente expectative.

C’est un Cerdan, ne l’oublions pas. Jamais ! Parenthèse, à propos de la mentalité de Cerdagne : au Conseil Général d’alors, son père Joseph, qui était maire de Bourg Madame (de 1965 à 1995***), était capable de tous les excès de langage et autres dialogues en forme de tringle, au travers de mimiques et gestuelles historiques, pour imposer les mêmes infrastructures et facilités à Bourg Madame qu’à Perpignan. La ville comme à la campagne, pour la qualité des routes, des soins… la Qualité de Vie tout simplement. C’était son credo.

Plus tard, François le fils réussira la qualification sanitaire transfrontalière avec l’ouverture de l’Hôpital de Puigcerda (Cerdagne espagnole). Une première transpyrénéenne côté Catalogne.

Que ce soit sur le TGV, la rénovation des quartiers indignes dans le centre-ville perpignanais et tant d’autres dossiers, il a essayé d’avancer, avec des idées pionnières, mais souvent ses meilleurs amis politiques ont été ses plus farouches opposants. Vous connaissez l’adage : “Protégez-moi de mes amis, quand à mes ennemis je m’en charge” (citation de Voltaire).

A l’arrivée, ces derniers, armés de toutes les mutations possibles, et celles inimaginables, la forteresse Calvet n’a jamais été ébranlée d’un pouce.

Quoi qu’on en dise, quoi qu’on en pense, il est le seul à : avoir battu par deux fois le socialiste Christian Bourquin dans les starting-blocks de la députation ; avoir résisté aux croche-pieds et autres crocs-en-jambe de l’Alduyisme**** ; avoir acclimaté les catalanistes ; avoir ringardisé les ayatollah à la chlorophylle*****… tous en pâtissent encore et encore à chaque rendez-vous électoral. Ils n’ont pas fini de s’en mordre les doigts ! Wait and see.

Et peu importe les fluctuations politico-politiciennes, ou politicardes, que certains lui prêtent – ou voulaient l’affubler -, “à géométrie variable”. Pourtant, il n’a jamais changé de camp, lui. Toujours à droite. Droit dans ses convictions. Et en même temps arrangeant, diplomate s’il le fallait, quitte à fréquenter une certaine extrémité de l’échiquier, juste le temps d’un calumet de la paix.

Le personnage a des ressources insoupçonnées, surtout en coulisses.

Il restera un battant, un winner – on ne demeure pas plus de trois décennies sur la scène politique catalane sans une forme de talent -, éternellement passionné sur une terre à forte identité balayée par la tramontane : “Ce n’est pas la girouette qui tourne, c’est le vent” (sic Edgar Faure). Et côté vent, dans les P-O, en ce moment, nous sommes plutôt (bien) servis ! Parait que c’est excellent pour assainir l’atmosphère.

C’est évident, François Calvet ne laisse personne indifférent, surtout dans le personnel politique, de tous bords et chez les médias..

Sur tout cela, nous aurons l’occasion de revenir. Car on ne tourne pas si brièvement une si lourde page de la mémoire collective roussillonnaise.

 

L.M.

*Lauriane Josende, qui est actuellement sa sénatrice-remplaçante, est candidate à sa succession. Les investitures, la sienne et celle de l’autre sénateur LR des P-O, Jean Sol, doivent être entérinées par les instances nationales.

**Battu en 1993, aux Municipales à Perpignan, il figurait sur la liste conduite par Claude Barate (RPR), face à Jean-Paul Alduy (Perpignan Oxygène/ Divers Droite et Centre/ Dissident de l’UDF) vainqueur du scrutin. Battu également en 1997, aux Législatives dans la 3e circonscription des P-O, face à Christian Bourquin (PS), mais François Calvet prendra sa revanche en 2002 et en 2007.

***Joseph Calvet a porté la population municipale de Bourg Madame d’environ 700 habitants à plus de 1 200 à cette époque là ! Il a été conseiller général du canton de Saillagouse de 1976 à 1994. Au total, trente années de vie publique, comme le fiston, François !

****L’Alduyisme, pour désigner une période pendant laquelle Paul Alduy (1959 à 1993) puis son fils Jean-Paul (de 1993 à 2009) ont dirigé la Ville de Perpignan. Les deux ont également été sénateurs des P-O.

*****Ayatollah à la chlorophylle : le terme a été inventé par Jean Marti, alors maire de Cerbère (de 1965 à 1995).