(Communiqué)
-“Mettre la souveraineté alimentaire et la transition agroécologique en chapeau d’une politique qui n’évolue pas, qui tire sur les mêmes ficelles : il fallait oser ! C’est ce décalage qui nous a frappés lors de la présentation, ce matin en CSO, par le ministre de l’agriculture des premiers arbitrages du plan stratégique national de la France pour la PAC
Le ministre dit s’appuyer sur la « science », mais il fait comme si tout allait bien avec la PAC actuelle. Dans une récente tribune[1], plus de 700 scientifiques jugeaient au contraire que « Les petits pas de la politique agricole commune ne suffisent plus ».
La précarité alimentaire a explosé, le revenu paysan est en berne, l’urgence climatique se vit quotidiennement sur les fermes, l’emploi paysan disparaît encore et encore, mais le ministre propose de ne rien changer à la principale politique agricole et alimentaire…
Le Ministre dit faire le choix de la « stabilité », c’est donc qu’’il assume de figer les inégalités. Il se dit satisfait que 55% des aides aillent à 20% des agriculteurs et assume donc que certains n’aient absolument rien !
Malgré des mois de travail avec la DGPE, de propositions concrètes, chiffrées et ciblées, c’est un rejet de nos trois grandes revendications pour une architecture sociale de la PAC : revalorisation du paiement sur les premiers hectares, aide petite ferme et plafonnement. Ce sont pourtant des leviers pour développer l’installation et l’emploi paysan, seule façon d’avancer réellement dans la transition agroécologique et en faveur de la souveraineté alimentaire. La convergence est aussi limitée au strict minimum.
Sur les aides bovines, l’intérêt du passage d’une aide à l’UGB sera minoré par le choix de fusion des aides lait et viande, au détriment de l’élevage allaitant déjà en crise.
Sur l’aide petites fermes, dispositif déjà existant dans la PAC sous le nom « d’aide forfaitaire petits agriculteurs » la France s’y refuse encore. Comme si cela répondait aux mêmes enjeux, le ministre annonce une aide maraichage de dix millions. Des miettes, au regard de l’état de la filière fruits et légumes en France. Son faible montant la rendra aussi très restrictive. Si les modalités ne sont pas encore finalisées, cette aide ne concernera pas l’arboriculture et serait limitée à des fermes de un à trois ou quatre hectares en surface totale. Les très petites fermes et les fermes diversifiées, qui sont celles qui créent de l’emploi, de la valeur ajoutée et œuvrent à la relocalisation en seraient alors exclues.
Sur l’éco-régime, pas de progressivité comme nous le demandions. Aussi tout le monde y aura accès même en gardant les pratiques actuelles. Le greenwashing est bien à l’œuvre puisque HVE 3 et AB sont mises au même niveau.
Quant à la principale augmentation du second pilier, elle concerne l’assurance récolte, si chère à la FNSEA, avec trente-six millions d’euros en plus. On sait pourtant que c’est une fausse solution contre les effets du changement climatique alors que des MAEC ambitieusement dotées seraient efficaces.
En démocratie, ne pas être d’accord avec les arbitrages d’un ministre se vaut d’être traité de menteur. Le ministre nous accuse d’être dans la « posture ». Lui a choisi l’imposture. Qui assumera en 2027 l’énième plan de licenciement qui découlera de ces arbitrages ?
Nous avons donc claqué la porte du CSO, comme les autres organisations de la Plateforme pour une Autre PAC présentes. Notre détermination reste pourtant totale au nom du monde agricole et de celles et ceux qu’il nourrit, et nous le montrerons le 27 mai prochain en nous mobilisant pour une PAC plus équitable, sociale et pour l’emploi paysan”.
[1] https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/05/03/climat-et-biodiversite-les-petits-pas-de-la-politique-agricole-commune-ne-suffisent-plus_6078952_3232.html