*PAF = Paysage Audiovisuel Français
(Vu sur la Toile)
Ce que contient le « Complément d’enquête » sur Cyril Hanouna
(Article de Par Olivier Ubertalli • Rédaction de l’hebdomadaire Le Point)
« Le Point » a visionné l’enquête « Cyril Hanouna : le nouveau parrain du PAF », diffusée ce jeudi soir sur France 2. Voici les séquences les plus marquantes.
Par Olivier Ubertalli
Le Point.- C’est l’enquête la plus attendue du paysage audiovisuel français. Diffusée ce jeudi soir, à 23H, sur France 2, Cyril Hanouna : le nouveau parrain du PAF s’intéresse à l’un des animateurs de télévision les plus populaires de France. Celui sur lequel circulent aussi de nombreuses rumeurs et de supposés liens avec les réseaux mafieux.
La journaliste Virginie Vilar a enquêté depuis fin janvier 2023, soit depuis dix mois. Le Point a exceptionnellement pu visionner ce portrait en compagnie d’une poignée d’autres journalistes. Il dure environ soixante-sept minutes, soit plus qu’un reportage classique de cinquante-deux minutes. À quelques heures de sa diffusion, Virginie Vilar était encore en montage. « Je viens de recevoir de nouveaux éléments d’enquête », dit-elle, énigmatique.
Pour Complément d’enquête, elle a interrogé environ deux cents cinquante personnes, contactant notamment trente-deux collaborateurs du présentateur de Touche pas à mon poste (TPMP). Seule Valérie Bénaïm a été autorisée par Cyril Hanouna à parler face aux caméras des équipes du groupe audiovisuel public. « À TPMP, on passe quatre heures ensemble par jour. On s’invective, on se réconcilie. C’est comme le rôti du dimanche. Une famille bis. TPMP suinte Cyril Hanouna, suinte sa folie. Il est tour à tour père de famille, sale gosse, etc. Cyril a plein de visages », témoigne-t-elle.
D’autres proches de Cyril Hanouna, interrogés anonymement et dont les voix ont été brouillées afin qu’elles soient méconnaissables, sont moins laudatifs. Beaucoup moins. « Celui qui veut parler, qu’il parle, mais qu’il m’appelle avant, sinon je le défonce », avait averti l’animateur en direct. « Il est capable d’une grande méchanceté, des pires crasses. Il fait régner une ambiance de terreur. Il exerce une vraie emprise », dit une personne interrogée.
Le document décortique en particulier la mécanique de l’émission. « Sur la table de droite, ce sont les gens les plus importants. La première place à droite est celle du copilote. Et il y a la place de la potiche. » Une place occupée par Jessie Claire, chroniqueuse pendant trois mois et soumise à une séquence de speed dating lors de la première émission. « J’étais, d’entrée de jeu, le nouveau bout de viande. […] Je n’avais pas du tout signé pour cela », raconte-t-elle.
« On n’est pas journalistes »
L’émission s’intéresse aussi au côté flambeur de Cyril Hanouna, dont le patrimoine s’élèverait à quatre-vingt-cinq millions d’euros. Un homme qui achète un yacht Lamborghini dont il n’existe que soixante-trois exemplaires dans le monde et dont le prix catalogue atteint trois millions d’euros. Un aficionado de la mer qui refuse de rémunérer l’équipage avec un contrat français afin d’éviter de payer des charges sociales et qui, révèle l’enquête de France Télévisions, se facture à lui-même la location de son yacht à partir d’une société basée à Guernesey afin d’éviter d’avoir à débourser la TVA sur une facture de plus de 5 000 euros d’essence pour son bateau. Cette séquence ne manquera sûrement pas de faire réagir l’intéressé.
Aucun dirigeant de Vivendi, que ce soit Yannick Bolloré, président du conseil de surveillance de Vivendi – qui contrôle la chaîne C8 où officie Cyril Hanouna – ou son père Vincent Bolloré, qui a beaucoup misé sur l’animateur, n’a accepté de s’exprimer. C’est un autre dirigeant qui se fait l’avocat surprenant de Cyril Hanouna : Arnaud Lagardère, PDG du groupe Lagardère qui vient de passer sous contrôle de Vivendi. « Il n’est qu’un simple amuseur mais un journaliste dans le sens noble du terme », affirme-t-il sans sourciller.
Complément d’enquête évoque pourtant la non-protection du secret des sources – principe fondamental du journalisme – par Cyril Hanouna et son bras droit, le producteur Lionel Stan. En mars 2023, quatre personnes cagoulées avaient été présentées à tort par Cyril Hanouna comme des policiers de la Brav-M (brigade de répression de l’action violente motorisée). Celui qui parle sur le plateau, l’ex-policier Cédric Vladimir, raconte comment la production lui aurait menti en décidant de le présenter, avec ses partenaires, comme de la Brav-M.
À la suite à une enquête de l’IGPN, la police des polices, la production de TPMP a fourni les identités et adresses des personnes cagoulées. L’une d’elles a eu trois jours de suspension sans salaire ; l’autre, un blâme ; un troisième policier, qui a nié être allé à l’émission, risque une exclusion. Lorsque la journaliste de France Télévisions demande au producteur Lionel Stan pourquoi il a transmis les informations sans protéger les sources, comme l’émission s’y était engagée, il répond par téléphone : « J’ai eu une réquisition judiciaire. On n’est pas une agence de presse, on n’est pas journalistes. »
« Soumis à Vincent Bolloré »
L’enquête du groupe public s’intéresse également aux recettes que Cyril Hanouna permet à C8 d’engranger. En septembre 2023, un spot publicitaire de trente secondes à l’heure de diffusion de TPMP valait 7 000 euros net, contre 150 euros durant l’émission à la mi-journée de William Leymergie. Hanouna pèse pour « la moitié des recettes publicitaires de C8 », affirme la journaliste.
On voit également le député Insoumis Louis Boyard insulté par Cyril Hanouna lors de son passage dans l’émission. « Il est totalement soumis à Vincent Bolloré. Je suis pour un mouvement de libération de Cyril Hanouna », assure-t-il avec ironie. Michael Zazoun, qui a reçu des coups de fil injurieux de la part de la mère de Cyril Hanouna, parle face à la caméra. Il avait également été victime d’un canular homophobe de Cyril Hanouna sur C8. Une séquence qui a valu à la chaîne du groupe Canal+ une amende de trois millions d’euros infligée par l’ARCOM (ex-CSA).
Après le visionnage de son sujet, Virginie Vilar explique : « J’ai cherché à aller au plus près du personnage. Je ne suis là ni pour le dézinguer ni pour le faire chuter. » Cyril Hanouna sera-t-il du même avis ? Réponse dans TPMP.
(Source Le Point)