Tribune Libre/ Claude Barate* : “Une VIe République ? Pourquoi faire ?”
par adminLuc le Jan 7, 2025 • 17 h 55 min Aucun commentaire*Par Claude Barate, universitaire, député honoraire
-“La VIe République, c’est le terme utilisé par tous ceux, plutôt à gauche, mais pas que, qui croient trouver dans le slogan magique la réponse miracle aux problèmes politiques de notre société. Ce qui se cache derrière le mot est incertain
Pour les uns, la Constitution doit redevenir totalement parlementaire. En général, les mêmes demandent le retour de la proportionnelle intégrale à l’élection législative, de sorte que chacune des diverses forces politiques soient représentée à l’Assemblée Nationale. C’est plus démocratique disent-ils. Ce qu’ils oublient de dire, c’est que si la majorité ne se dégage pas au niveau du peuple, elle se dégagera au niveau des majorités successives parlementaires. On en voit un exemple criant aujourd’hui au travers des diverses lignes rouges édictées par chacune des formations. Les décisions successives étant le résultat des négociations entre divers groupes politiques, parfois bien loin des préoccupations des français. Où est la démocratie là -dedans, lorsque ce n’est pas la volonté du peuple, mais celle des partis qui se réalise ?
Pour les autres, bien moins nombreux, la solution serait dans un régime de type présidentiel, comme aux Etats-Unis, sans capacité de dissolution, ni de motion de censure. Ils espèrent ainsi avoir une stabilité institutionnelle, sans trop se préoccuper d’un blocage éventuel du pays, pendant quatre ans si la majorité au Sénat et à la Chambre des représentants, n’est pas la même que celle du Président.
Bref, derrière le mot, il n’y a rien de bien précis ou presque.
Pourquoi vouloir changer une Constitution qui a su répondre aux divers problèmes posés dans le temps et qui répond aux besoins du pays depuis plus de soixante-six ans ?
La Constitution est un document sacré puisqu’il a été adopté par le peuple pour organiser le fonctionnement des pouvoirs publics. C’est pourquoi, elle ne doit être modifiée que d’une main tremblante.
La Constitution actuelle a été voulu par le Général de Gaulle et Michel Debré et adoptée par le peuple en 1958. A l’origine elle s’inscrivait en opposition à la 4éme République, dont le régime des partis, s’il ne s’était pas opposé au développement après-guerre du pays, s’était heurté à l’écueil infranchissable, pour un régime faible, de la décolonisation du pays.
Cette volonté de corriger les défauts de la Constitution précédente se retrouve d’ailleurs dans toutes les modifications constitutionnelles depuis la Révolution jusqu’à nos jours.
A des régimes de concentration des pouvoirs succèdent des régimes aux pouvoirs éclatés et vice-versa, lorsqu’il s’agit d’aborder des crises graves, comme des guerres ou les décolonisations précitées.
D’ailleurs le sage Solon, philosophe et homme d’Etat Athénien du 6éme siècle avant JC, répondait déjà à un disciple qui lui demandait qu’el est le meilleur régime politique : « Cela dépend du pays, du temps et des problèmes à résoudre ».
Or le problème à résoudre en France, n’est pas celui des institutions. Elles se sont parfaitement adaptées aux besoins du moment passant d’un régime parlementaire rationnalisé pour éviter les travers de la 4éme, à un régime plus présidentiel, avec l’élection du Président de la République au suffrage universel direct et son accentuation après que Lionel Jospin ait convaincu Jacques Chirac de la nécessité de réduire le mandat à cinq ans avec des législatives qui suivent la présidentielle.
Ces institutions ont permis les alternances nécessaires à tout régime démocratique, elles ont permis les cohabitations tout en dégageant des majorités de gouvernement.
Non, ce qui est en jeu, et qui est la cause de la crise politique dans laquelle nous sommes, c’est la volonté affichée d’Emmanuel Macron de vouloir conduire une politique dite du centre, avec son funeste en même temps.
C’est cette politique qui, au lieu de rassembler les français autour de leur défense et de la grandeur de la France, les a divisés et a fait monter les extrêmes. Et plus il écarte les extrêmes d’un cercle qu’il appelle républicain et plus il affaiblit ce dernier.
La politique dite au centre, n’a aucun sens pour la population qui comprend mieux l’alternance droite-gauche. Cela veut-il dire que le centre n’a aucun intérêt ? Bien sûr que non. Une politique de gauche a besoin d’être éclairée et adoucie par une politique de centre gauche et vice-versa.
En démocratie, c’est le peuple qui doit choisir, après qu’il ait été bien informé. Et il faut des choix clairs qui s’imposent au législateur, le cas échéant par la voie du référendum.
Le problème français, ce n’est pas la Constitution, mais la politique d’Emmanuel Macron !”
Claude Barate, universitaire, député honoraire