Jadis, pousser la porte d’une banque pour y souscrire un prêt relevait du parcours du combattant, de l’Aventure ; ça, c’était avant !

Pourtant, aujourd’hui, dans certaines banques – pour ne pas écrire dans la plupart ! – en 2014 il n’a jamais été aussi urgent… d’attendre. L’austérité est de rigueur.

Au bout du “compte”, ces banques françaises mettent les consommateurs au régime sec, même lorsque ceux-ci, à la recherche d’une autre autonomie financière, affichent du répondant en gérant au mieux leur activité professionnelle et en se consacrant pleinement à l’expansion de leur petite entreprise.

Alors que le leitmotiv de la croissance est sur les lèvres de tous nos décideurs, hommes politiques ou patrons, hauts-fonctionnaires comme décisionnaires, voilà que l’étau se resserre chaque jour davantage sur les clients, à cause d’établissements financiers, souvent peu scrupuleux, qui renforcent les handicaps pour accéder à de simples prêts, qui érigent de nouvelles contraintes vis à vis des contribuables, qui obligent à d’étonnantes souscriptions à la limite de l’illégalité, etc.-etc.

L’aventure qu’a connu un chef d’entreprise d’Argelès-sur-Mer auprès de sa Caisse locale du Crédit-Agricole Sud-Méditerranée est en ce sens édifiante, pour le moins…

En février 2013, rendez-vous est pris avec sa banque “en vue d’obtenir un prêt de 267 000€”.

Un mois plus tard, le dossier complété et définitif de demande d’ouverture de prêt est remis au guichet de ladite banque. Rien ne manque à l’appel. Aucune correction à apporter, le chef d’entreprise a déposé un dossier impeccable.

“Cela n’empêche pas le Crédit-Agricole de me balader pendant des mois, de faire diversion en quelque sorte, de n’apporter aucune réponse à ma demande : ni autorisation, ni refus (…)”.

Pendant ce laps de temps, le chef d’entreprise échange avec sa banque des courriels, des coups de fil, des points d’interrogation… Il se déplace à maintes reprises… Il apprend dans un premier temps, bien plus tard que le délai arrêté en commun avec son contact bancaire, que l’établissement financier a égaré certains documents, que dans un second temps il manquerait à nouveau mille et une pièces…

“Il me manque des éléments pour le prochain Comité, mais je pense que vous me les aviez déjà envoyés ou porté à l’agence (…)”, lui écrit le 17 juin 2013 ce fameux conseiller de la banque. Balèze, non ?

Le 19 juin 2013, le Crédit Agricole précise à “sens unique” – sans au préalable l’en avoir informé – au chef d’entreprise de nouvelles règles du jeu, avec des garanties revisitées… “Bref, on me tient encore des semaines le bec dans l’eau !”, s’impatiente le client qui, le 28 juin 2013, décide de retirer son dossier tout simplement pour aller voir ailleurs.

Son conseiller bancaire agite un refus, lui précisant “Que désormais il est impossible de faire demi-tour (…)”.

Le 4 juillet 2013 – Cinq mois plus loin ! – le prêt lui est enfin accordé, mais avec une modification de garanties conséquente : le nantissement d’un produit d’épargne à souscrire dans les livres du Crédit-Agricole, d’un montant de 50 000€ !, jusqu’à la vente de l’un de ses biens.

La banque prête, mais sous la contrainte de la constitution d’une épargne bancaire obligatoire représentant 19% du prêt, puisque les 50 000€ sont à soustraire des 267 000€ !

Et l’interlocuteur du Crédit Agricole s’étale en formules de politesse pour expliquer au chef d’entreprise “Que c’est là une décision pleinement satisfaisante du Comité pour l’obtention du financement (…). J’espère que vous ne vivez pas ce placement de 50 000€ comme un frein à notre collaboration ? (…)”. Et il ose en remettre une couche, épaisse de préférence : “Mon siège souhaite que vous réalisiez un pas en avant dans la constitution d’une épargne bancaire à moyen ou à long terme (…)”. Incroyable !

Le chef d’entreprise, à la tête d’un patrimoine immobilier conséquent, ainsi que d’actifs, de plusieurs portefeuilles et SCI au développement économique et commercial exemplaires, n’en revient pas ; “En réalité, tout cela a été fait pour me désinformer, pour m’embrouiller, pour  m’enfumer je le pense sérieusement, dans l’intention affichée de séquestrer pour 15 ans mon épargne, car malgré de nombreuses tentatives amiables le Crédit Agricole refuse de libérer mes fonds. Le procédé est scandaleux, mais là où les gens doivent être prévenus c’est que nombreux sont les prêts viciés au niveau du TEG (Taux Effectif Global)”.

Le TEG est destiné à représenter le coût réel d’un prêt. C’est d’ailleurs pour protéger les particuliers et éviter qu’ils ne puissent être induits en erreur par des publicités tapageuses, trompeuses, que le législateur a créé le TEG.

En l’occurrence, ici, le TEG semble ne pas avoir rempli ces conditions, alors qu’il doit prendre en compte l’ensemble des frais obligatoires liés au financement : le taux d’intérêt du prêt ou le taux d’intérêt nominal, les frais de dossiers, les primes d’assurance décès-invalidité et incapacités temporaires de travail obligatoires, les frais de garantie… Le TEG ne doit pas dépasser le taux d’usure légal fixé par la Banque de France pour un prêt à taux fixe.

Cela n’empêche pas, hélas trop souvent, le particulier – en dépit de cette protection supplémentaire qui lui est apportée par la loi – de se retrouver démuni face au TEG qui requiert des calculs financiers parfois complexes et manquant solidement de transparence. Cela semble avoir été le cas présentement.

Le chef d’entreprise a mis l’affaire entre les mains de son avocat afin que celui-ci “explore les vices cachés du dossier (…). Nombreux sont les clients qui sont malheureusement abusés sans le savoir par des délinquants en cols blancs, il faut le dire, il faut mettre tout ça sur la voie publique et, au final, ne pas hésiter à ester en justice”, s’insurge-t-il à raison.

Le 5 mai dernier, le conseil du chef d’entreprise dont il est ici question, a adressé un courrier en recommandé à la Direction de la Caisse régionale du Crédit Agricole Mutuel Sud-Méditerranée, car l’affaire est loin d’être close. Le chef d’entreprise confirme qu’il ira jusqu’au bout, “même si je dois me battre seul contre tous, car j’estime qu’on a tenté de me forcer la main en tant qu’emprunteur, en tout cas je l’ai vécu comme une tentative d’escroquerie car mon consentement a été vicié et altéré (…)”.

Mais le chef d’entreprise argelésien sait d’ores et déjà qu’il ne sera pas seul à mener ce combat, ce ne sera pas David contre Goliath, puisque des soutiens se sont manifestés à ses côtés depuis : “Je vais m’attacher à fédérer tous ces mécontentements, je vais réunir nombre de commerçants de la station d’Argelès-sur-Mer ainsi que du département qui ont vécu comme moi cette mésaventure, et ensemble nous allons réagir !”.

– On a appris ce mercredi 11 juin 2014 que le commerçant d’Argelès-sur-Mer a décidé d’assigner ladite banque au Tribunal de Grande Instance (TGI) de Perpignan.

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