(Vu sur  la Toile)

 

Après le Qatar, le Maroc est soupçonné d’avoir corrompu des députés du Parlement européen
(Article de Nelson Getten, avec Juliette Desmonceaux • Rédaction BFTM)

Le Parlement européen est dans la tempête après que sa vice-présidente et trois autres personnes ont été écrouées pour corruption et blanchiment d’argent en lien avec le Qatar. Le Maroc pourrait avoir lui aussi offert des pots-de-vin à des élus.

BFMTV.- Après le Qatar, le Maroc ? Alors que les révélations concernant une possible affaire de corruption mêlant des députés européens et le Qatar continuent de secouer le Parlement européen, un autre pays nourrit des soupçons. Il s’agit du Maroc, qui pourrait être lui aussi impliqué dans ce scandale.

 

Un “lien très fort” entre un eurodéputé italien et le Maroc

Le lien entre le Qatar et le Maroc, c’est Antonio Panzeri, un ancien eurodéputé italien, actuellement incarcéré à Bruxelles dans l’affaire du “Qatargate”. Dans une note confidentielle datée de 2011 que s’est procurée BFMTV, l’ambassadeur du Maroc évoque la question du Sahara occidental. Ce territoire occupé illégalement par Rabat serait l’objet d’une “forte demande du Parlement européen”.

“Le meilleur moyen de gérer cette pression est de la canaliser par le biais d’Antonio Panzeri. Sur cette question, Antonio Panzeri a entamé un travail méthodique depuis son élection à la tête de la délégation du Maghreb”, assure l’ambassadeur.

Pendant une dizaine d’années, l’eurodéputé continue ensuite à défendre régulièrement les intérêts du Maroc au sein de l’institution européenne. Ana Gomes, une ancienne eurodéputée, affirme avoir été directement témoin de ces pratiques.

“L’engagement de M. Panzieri à défendre le point de vue du Maroc, à contrer la campagne pour les droits de l’Homme (…) m’a fait suspecter qu’il y avait un lien très fort avec le Maroc”, estime à BFMTV l’ex eurodéputée portugaise.

700 000 euros retrouvés en liquide

Plusieurs éléments appuient les soupçons de corruption de l’eurodéputé. D’une part, lors de la perquisition effectuée à son domicile à Bruxelles, les forces de l’ordre ont mis la main sur 700 000 euros en liquide. Une bonne partie proviendrait du Maroc, selon les aveux de l’assistant de l’eurodéputé, Francesco Giorgi.

Par ailleurs, des écoutes réalisées auprès de l’épouse d’Antonio Panzieri montrent qu’elle a touché de l’argent de Rabat grâce à Abderrahim Atmoune. Un grand ami de l’Italien, à l’époque parlementaire et devenu aujourd’hui ambassadeur du Maroc en Pologne.

 

Un eurodéputé français conseiller du roi du Maroc ?

Mis à part Antonio Panzieri, d’autres eurodéputés ont entretenu des rapports étroits avec le Maroc. L’un d’entre eux est français, il s’agit de Gilles Pargneaux, eurodéputé socialiste jusqu’en 2019.

Président du groupe d’amitié UE-Maroc, il a multiplié les voyages payés par le Maroc, auxquels il invitait d’autres députés. Sur son compte Facebook, des clichés montrent le député recevoir des cadeaux.

“C’était vraiment gênant, parce qu’il n’avait pas honte de se présenter au sein du Parlement comme conseiller de Sa Majesté le roi (du Maroc)”, alors qu’il était eurodéputé français, indique Ana Gomes. “Tout le temps, il défendait les positions du Maroc”, ajoute-t-elle.

Cadeaux et distinctions

Gilles Pargneaux a reçu à plusieurs reprises des décorations des autorités marocaines, et notamment de la part du Sahara occidental qui l’a ouvertement remercié le groupe d’amitié UE-Maroc pour ses services.

“C’est une distinction qui montre l’intérêt qu’accorde Sa Majesté le roi d’abord à l’action parlementaire et à l’action de cette équipe fantastique qui défend nos intérêts vitaux devant les instances internationales”, avait déclaré à la télévision marocaine Mohamed Cheikh Biadillah, un conseiller du roi du Maroc, lors de l’une de ces cérémonies.

Après avoir quitté le Parlement européen en 2019, Gilles Pargneaux a maintenu des liens avec le Maroc, puisqu’il a fondé une ONG avec Mohamed Cheikh Biadillah. Il travaille aussi pour un cabinet de lobbying à Bruxelles dont le principal client n’est autre que le Maroc.