Dans les minutes, heures, les jours, les semaines qui viennent, les réseaux sociaux vont nous submerger de vidéos, de témoignages, d’images insupportables et dévastatrices dans l’opinion publique internationale, montrant des Afghans à l’agonie, plongés dans une détresse extrême à cause de l’arrivée au pouvoir des méchants talibans. Et c’est nous, Occidentaux, qui serons bien sûr montrés du doigt et bien évidemment accusés d’être les salauds de service. Comme d’habitude.

Certaines ONG, au passage, ne manqueront pas – c’est leur business charity et leur raison d’exister pour quelques unes d’entre elles -, d’essayer de nous attendrir, en nous faisant pleurer dans nos chaumières gauloises, surtout en nous culpabilisant de ne pas réagir… en activant nos cartes VISA !

Et pourquoi serions-nous coupables, nous ? C’est absurde

Hier soir, dans sa déclaration solennelle, le président des Etats-Unis d’Amérique, Joe Biden, a défendu fermement et objectivement sa décision de retirer les soldats américains du bourbier afghan. “Un retrait difficile et désordonné”, a admis Joe Biden, tout en défendant sa décision : “Les événements que nous voyons actuellement sont la triste preuve qu’aucune quantité de force militaire n’aurait permis d’obtenir un Afghanistan sûr, uni et stable, connu dans l’histoire comme le cimetière des empires(…)”. Il a poursuivi : “Notre mission n’a jamais été de construire une nation en Afghanistan, n’a jamais été censée créer une démocratie unifiée centralisée (…). L’objectif unique reste aujourd’hui, et a toujours été, d’empêcher une attaque terroriste sur le sol américain”.

1 000 milliards de dollars US ont été injectés pendant vingt ans pour former l’armée afghane et développer une économie dans le pays. La débâcle des soldats afghans qui n’ont même pas combattu cinq minutes pour défendre le peuple – car là est la réalité -, la plupart des militaires ont préféré abandonner les leurs pour prendre la poudre d’escampette et rejoindre les pays frontaliers à la vitesse de l’éclair… à l’image du président Ashraf Ghani qui a quitté le navire à Kaboul, fuyant à l’étranger en hélicoptère avec un convoi de plusieurs voitures remplies d’argent liquide (source : ambassade de Russie à Kaboul) ! Cela nous donne le niveau de corruption qui sévissait dans le pays, avant l’arrivée des talibans. Lesquels, certes, s’installeront vite et plus confortablement encore dans la tradition.

Le président français, Emmanuel Macron, dès 20H hier soir, a été le premier chef d’Etat au Monde à prendre la parole sur les événements afghans et la prise du pouvoir par les armes par les talibans, après s’être entretenu du sujet par téléphone avec la Chancelière allemande et le Premier ministre britannique. Fidèle à ses engagements, il a joué la carte de la transparence, ce qui sur la forme comme sur le fond ne peut lui être reproché. Et ce, quoi que l’on pense du personnage.

Lors de son allocution télévisée, le Président Macron a, entre autres, promis de “protéger celles et ceux qui sont les plus menacés”, mais les termes choisis ont indigné une partie de la gauche boboïsée française. Comme d’habitude. Cette gauche-bébé-Cadum-biberonnée-à-la-naphtaline-des-années-soixante-soixante-dix-quatre-vingt n’aurait pas apprécié le passage suivant : “Nous devons anticiper et nous protéger contre des flux migratoires irréguliers qui mettraient en danger ceux qui les empruntent et nourriraient les trafics de toutes natures” (Emmanuel Macron).

Cette même gauche devrait se souvenir que c’est un homme de gauche, Michel Rocard, qui a été le Premier ministre d’un autre homme de gauche, François Mitterrand, alors Président de la République française, qui le 3 octobre 1989 a prononcé pour la première fois publiquement la formule qui restera dans les mémoires : “La France ne peut accueillir toute la misère du monde…”. Michel Rocard est alors l’invité de la journaliste-vedette Anne Sinclair, dans l’émission 7 sur 7 (TF1). Il précise la nouvelle position de la France en matière d’immigration, et déclare très précisément : “Nous ne pouvons pas héberger toute la misère du monde. La France doit rester ce qu’elle est, une terre d’asile politique (…), mais pas plus !”. Formule que Michel Rocard nuancera quelques années plus tard, le 4 juillet 1993, toujours chez Anne Sinclair, mais qu’il maintiendra sur le fond.

Dans ces dramatiques événements qui se déroulent sous nos yeux en Afghanistan, l’un des reproches qui peut nous être fait tout le long de ces vingt dernières années, à nous Occidentaux impliqués dans le processus de tentative de démocratisation de la vie publique afghane, du quotidien des Afghans, au-delà d’avoir négligé de préparer la paix après la guerre : c’est, peut-être, d’avoir formé un peuple d’assistés, protégés par une armée corrompue.

Certes, cela ne doit surtout pas nous empêcher d’avoir de l’empathie pour le peuple afghan et, surtout, à l’avenir, d’être présent pour répondre à ses appels ;  aider, soutenir, accompagner les Afghans… sans jamais une seule seconde baisser la garde s’agissant des Droits humains des femmes, des enfants et des hommes. L’oubli et l’indifférence seraient la pire des guerres.

L.M.