« Au rythme où vont les choses, l’agriculteur sera bientôt traité comme un délinquant !Â
Sur le principe du grand débat, le gouvernement vient de lancer une consultation de trois semaines où les Français pourront une fois de plus « humilier » les agriculteurs afin qu’une loi soit prononcée sur les distances d’épandages. La réalité, le véritable problème vient d’ailleurs…
Au commencement ce sont les promoteurs immobiliers qui ont construit en bordure des exploitations agricoles et qui en plus de « polluer le visuel », ont bien souvent étendu le macadam pour construire des lotissements dans des terres qui au départ étaient des terres agricoles.
Nous allons bientôt nous « étriper » sur un sujet totalement légitime du point de vue écologique, et pendant ce temps on continuera de s’habiller chinois, manger chinois, italien, espagnol, marocain ou américain et très peu local.
L’opinion une fois de plus va s’acharner contre nos paysans-agriculteurs en leurs faisant comprendre qu’ils dérangent et pour certains nous leurs demanderons tout simplement de cesser le maraîchage ou l’arboriculture à  proximité des habitations, alors que la faute est bien du côté de l’urbanisation anarchique et galopante qui est un abandon de nos territoires.
En ce qui concerne les “autres dispositifs susceptibles d’atténuer les expositions” aux pesticides, comme les haies, “aucune méthodologie validée ne permet de les prendre en compte” dans l’évaluation des risques.
On cherche bien sûr à montrer du doigt la responsabilité de l’agriculteur, alors que tout le monde est responsable et certains plus que d’autres. Il est clair aussi que les plus bio qui épandent du fumier seront à un moment ou un autre eux aussi montrés du doigt, critiqués, humiliés et parfois même lynchés en séances publiques.
Il est clair que les paysans n’ont plus leur mot à dire, et si on les écoutait ça se saurait
Les problèmes viennent aussi du fait que les politiques préfèrent que les surfaces agricoles deviennent des lieux de villégiature, des villages dortoirs ou des friches commerciales.
Et puis aussi, et cela peut de gens le savent, que ce sont les petites exploitations que l’on cherche encore à faire disparaître car elles sont beaucoup plus coûteuses en subventions que les très grandes exploitations. Il est vrai que la crise financière est passée par là et qu’il faut faire des économies, du moins montrer qu’on en fait ou qu’on veut en faire.
À vouloir faire disparaître les petites exploitations, un vent de révolte pourrait un jour souffler (parce que souvent on leur dit « il faut, il faut, il faut») changer votre système de production : faire du bio, faire de l’agriculture de proximité de la campagne à la ville, faire de l’écologie.
Bien sûr, c’est bien, c’est meilleur pour la santé, du moins paraît-il jusqu’à ce que l’on dise le contraire, jusqu’au jour où tout le monde se rendra compte que le bio vient le plus souvent d’Europe de l’Est où les critères « bio » ne sont pas les mêmes qu’en France.
Et puis si vous n’avez pas d’argent, vous n’avez qu’à acheter de la viande brésilienne provenant des fermes gigantesques d’Amazonie où la déforestation est catastrophique, ou de la viande Canadienne dont nos députés viennent de voter mardi 23 juillet la ratification du CETA, le traité de libre-échange entre l’Union Européenne et le Canada.
Bref, de nouveau les Français se retrouvent dressés les uns contre les autres. Maintenant que la crise des Gilets jaunes se calme un peu, le moment semble propice pour jeter en pâture quelques débats qui vont finir par tout affaiblir définitivement.
Attention, que ce genre de débats n’ait pas un effet contraire, qu’ils ne participent pas activement à une nouvelle révolte agricole et écologique bien plus grave que celle des Gilets jaunes.
Il est important de respecter les agriculteurs, car majoritairement nous sommes tous petits-fils ou arrière-petits-enfants de paysans. Il faut arrêter de jeter en pâture les métiers qui souffrent. Nous devons tout remettre à plat et surtout la quantité considérable de friches à cause de l’urbanisation anarchique et galopante qui est, en partie, responsable de cette situation. N’en faisons pas porter toute la responsabilité à l’agriculture.
Non, les agriculteurs ne sont pas des délinquants, mais comme pour d’autres crises à cause de ce genre de débat certains pourraient le devenir !”.
Hubert LEVAUFRE