(Vu sur la Toile)

 

Aveyron : trois personnes jugées pour avoir fait cuire leur victime avec « des patates et des carottes »
(Article de Thibaut Chevillard • Rédaction journal 20 Minutes)

 

Journal 20 Minutes.- Un couple et un homme sont jugés à part de lundi à Rodez pour avoir tué en février 2023 un homme esseulé afin de lui voler le cannabis qu’il faisait pousser

Un « druide » et ses complices jugés pour avoir cuit leur victime dans une marmite avec des légumes. Les faits, jugés par la cour d’assises de l’Aveyron, prêteraient presque à sourire. Un mode opératoire grotesque pour dissimuler un meurtre atroce. Surnommé « Diego », George Meichler, 60 ans, vivait reclus, sans eau, ni électricité, dans une petite maison en pierres, au cœur d’une forêt, dans les hauteurs de Brasc, une commune située à environ 40 km à l’ouest d’Albi, dans la vallée du Tarn. En février 2023, la victime a été séquestrée, violentée, décapitée, démembrée, bouillie et brûlée. L’enquête des gendarmes a rapidement permis d’identifier trois suspects qui seront jugés, du 19 au 22 mai, à Rodez.

A l’époque, la disparition du sexagénaire est signalée aux gendarmes par son ex-compagne, inquiète de ne pas avoir de ses nouvelles. Diego est effectivement absent de son domicile, et ses amis du club de boules ne l’ont pas vu depuis un moment. Son père, sa fille et l’un de ses amis ont aussi reçu un étrange SMS de sa part, leur signalant qu’il partait quelque temps en voyage en Bretagne avec une femme. Un message qui les trouble, l’homme n’ayant pas l’habitude d’en envoyer. Quant à la prose, elle ne lui ressemble pas. Les enquêteurs retournent chez Diego et pénètrent dans sa maison. Ils sont incommodés par une odeur nauséabonde. Ils découvrent aussi de curieuses traces noires dans le jardin, laissant penser qu’un feu a été allumé.

 

 

« Potion magix »

 

Très vite, leurs soupçons se portent sur Philippe Schneider, 56 ans, et sa compagne, Nathalie Caboubassy, 43 ans. Originaire du nord de la France, le couple est arrivé dans la région en mars 2019. Se prétendant druide, Philippe a tenté, en vain, de commercialiser en sex-shop une « potion magix » concoctée avec des plantes aphrodisiaques qu’il faisait pousser. Il a ensuite ouvert le camion pizza « Don Filipo » sans davantage de réussite. Ses anciennes compagnes le décrivent comme un manipulateur, un pervers qui les soumettait et les encourageait à fréquenter les clubs libertins.

Philippe et Nathalie ont été aperçus à plusieurs reprises conduisant le véhicule utilitaire de Diego. Le couple se trouvait parfois avec un certain Loup Benrakia, 24 ans. Les gendarmes retrouvent, dans le container à ordures de leur résidence des documents fiscaux, bancaires et médicaux appartenant à Diego. Ils découvrent également que son téléphone a borné pour la dernière fois le 1er février 2023 à Albi, en même temps que celui de Philippe qui se trouvait à une soixantaine de mètres.

Devant les enquêteurs, Philippe Schneider explique que Diego lui a demandé de nourrir ses animaux durant son absence. Il l’aurait aussi autorisé, pendant ce temps, à utiliser son véhicule utilitaire. Mais lorsqu’il est placé en garde à vue, sa version évolue. Il reconnaît l’avoir tué, mais il prétend qu’il ne s’agissait que d’un accident. Une dispute au sujet de ses mœurs sexuelles aurait mal tourné. Il l’aurait poussé. La victime serait tombée et se serait cogné la tête contre le mur. De retour chez lui, Philippe aurait imaginé un scénario consistant à faire croire aux proches de Diego que ce dernier était parti en voyage et lui avait laissé son véhicule. Il a, pour cela, récupéré sa carte d’identité, son passeport, son permis, et sa carte bleue et son téléphone portable. Les jours suivants, il s’est envoyé des messages à lui-même ainsi qu’au père et à la fille de la victime pour faire croire qu’il était vivant. Enfin, il s’est débarrassé de l’appareil en le jetant sur la route entre Albi et Saint-Sernin-sur-Rance (Sud-Aveyron, près de Saint-Affrique).

 

 

Des légumes et des herbes « pour les odeurs »

 

Au fil du temps, sa version varie encore. Devant le juge d’instruction, il reconnaît finalement avoir projeté de séquestrer Diego avec Loup Benrakia pour lui voler le cannabis qu’il faisait pousser. Cinq cents ou 600 grammes qu’il devait se répartir avec son complice et sa conjointe. « Soit on commettait un délit, soit on se retrouvait à la rue. » Pour convaincre Loup de l’aider dans son projet, Philippe lui raconte que Diego a violé la fille de son ex-compagne, ce qui n’a jamais été prouvé. Les deux hommes sont rentrés chez lui, avec des cordelettes, du scotch et des gants. Ils lui ont attaché les pieds et les mains et ont enroulé du scotch autour de sa tête. Ils ont ensuite fouillé la maison afin de mettre la main sur un grand sac contenant du cannabis. Ils l’ont aussi frappé afin d’obtenir son code de carte bleue, son adresse e-mail et son mot de passe.

Ils constatent quelques heures plus tard le décès de Diego, par « étouffement ». Le trio a l’idée de maquiller sa mort en départ volontaire. Ils espèrent ainsi profiter de son Jumpy et des aides sociales qu’il perçoit. Philippe extrait le corps de celui qu’il appelle son « frère » de sa maison, et le place dans un grand sac. La victime est transportée à Coupiac, où Philippe possède un terrain. Il attend deux ou trois jours, « pour respecter la transmigration de son âme ». Puis il découpe, seul, le corps « pour pas que Loup ait ça sur la conscience », avec un couteau et une feuille de boucher. « Pour sa mémoire, pour le respect de leurs conversations sur la vie », explique-t-il au juge d’instruction. Il place ensuite les membres dans un grand bidon bleu et les asperge d’eau de javel. Il brûle les viscères sur place et retourne à Brasc avec les restes du malheureux.

Il fait bouillir de l’eau dans deux marmites et les fait cuire avec des légumes et des herbes « pour que la chair brûle plus vite et pour les odeurs ». Loup a ensuite allumé deux feux qui servent à brûler la tête, les mains, les pieds et les vêtements de Georges Meichler. Pour respecter « le désir de Diego », ses cendres sont jetées à la volée sur son terrain pendant que Philippe « prie » pour le salut de son âme.

 

 

« Je savais sans savoir »

 

Les experts qui l’ont examiné le décrivent comme un homme à la personnalité narcissique, « marquée par un besoin de contrôle, de domination », et « souvent dans la manipulation et l’emprise d’autrui ». Addict à l’alcool et au cannabis, Philippe aurait été traumatisé par les abus sexuels dont il déclare avoir été victime durant son enfance. Nathalie, elle, n’est jamais loin de son conjoint. La quadragénaire au passé cabossé assure n’avoir qu’entendu Philippe évoquer avec Loup ce projet de « braquage ». « Je savais sans savoir », s’est-elle justifiée devant l’expert psychiatre. Mais elle n’y aurait pas prêté plus attention que ça car elle avait bu de l’alcool et fumé du cannabis.

Fossoyeur de profession, à l’intelligence « faible » selon une psychologue, Loup estime que Philippe lui a « monté la tête » avec cette histoire de pédophilie. Il s’agissait de faire avouer à Diego le viol d’une enfant. Puis de le faire disparaître tout en continuant « à le faire vivre fiscalement ». En échange de son aide, Philippe devait lui remettre « un peu d’argent ». Mais il minimise sa participation aux faits. « C’est lui qui l’a fait. Il voulait le faire bouillir pour que la viande se détache des os. Il y avait des patates et des carottes. Il m’a dit que si quelqu’un arrive, il faut dire qu’on fait cuire de la viande pour le chien », a-t-il raconté à l’expert psychiatre. Philippe « avait un regard noir. Il me disait ce que je devais faire. Je m’étais dit que si je n’obéissais pas, il me tuerait ».

Contactée par 20 Minutes, l’avocate des proches de Georges Meichler, Me Laurie Peytavin Stockmann, n’a pas souhaité s’exprimer avant le début du procès.

(Source : journal 20 Minutes)