(Vu sur la Toile)

Malgré une affluence visible sur les quais et dans les rues de Sète, les professionnels du tourisme et de la restauration déplorent une baisse marquée de la consommation. Pouvoir d’achat en berne, réservations de dernière minute et fréquentation en recul : une tendance qui touche tout le littoral héraultais à la mi-saison, d’Agde à la Grande-Motte.
(Théa Ollivier et Louise Brahiti – Rédaction Hérault-Tribune)

Hérault-Tribune.- Samedi 2 août, la promenade maritime de Sète est bondée. Ça parle dans toutes les langues, les enfants tiennent fermement la main de leurs parents tandis que des jeunes rient aux éclats sous le soleil. Si quelques terrasses le long du quai Maximin Licciardi sont remplies de spectateurs qui encouragent les jeunes jouteurs qui montent sur les barques le temps d’un tournoi, plusieurs restaurants sont volets fermés.

“Nos voisins sont fermés le midi parce que ce n’est pas rentable”, constate Gabriel de Pouzilhac, propriétaire du restaurant Oh Gobie depuis 13 ans. “On est dans une saison extrêmement calme, c’est triste de voir une ville remplie de gens qui se limitent.” À la table de son restaurant, il remarque que les clients s’organisent pour ne pas payer plein pot. “Ils partagent un poisson pour limiter les frais”, prend-il pour exemple. Sa clientèle repose à 30% sur les touristes internationaux, le reste se partage entre les locaux (20%) et les vacanciers français qui viennent du reste de l’Hexagone (40%). “C’est le national qui a surtout baissé. Les étrangers consomment, ils ont plus de pouvoir d’achat”, remarque-t-il.

Résultat, le début de saison n’est pas bon. “C’est compliqué de faire ce métier : on ne gagne rien et tout coûte trop cher, on ne peut pas réduire le prix de la masse salariale”, se désole le restaurateur qui ferme deux établissements sur trois par manque de rentabilité.

 

 

“Les clients consomment moins”

 

Quelques mètres plus loin, la terrasse du café Saint-Clair est clairsemée en milieu d’après-midi. Là, un couple de retraités qui prend un thé, ici une famille de touristes étrangers avec leur bébé qui se rafraîchit. Jean-Luc D’Issernio, le propriétaire, remarque que la fréquentation est en-dessous des années précédentes. “Il faut s’adapter car les gens partent un peu toute l’année et n’attendent pas le mois de juillet”, constate le patron qui a embauché seulement 12 saisonniers contre les 18 ou 20 habituellement. “Les clients consomment moins et font attention, ils prennent le burger ou le steak haché qui est moins cher.”

Sur les quais, Ndoumbé Diouf a installé son étal où elle vend des bijoux, des sacs et des chapeaux, comme d’habitude depuis dix ans. “On arrive à vendre mais ce n’est pas comme les années précédentes. Les gens demandent les prix et font le tour pour comparer les prix avant d’acheter pour être sûr de prendre le moins cher. Ils font attention à leurs dépenses”, observe-t-elle.

Quelques chiffres confirment ce ressenti. Tiphaine Collet, directrice de l’Office de tourisme intercommunal Archipel de Thau, distingue deux périodes très contrastées : “Du 1er au 15 juillet, on observait une hausse de 4,3 % du nombre de nuitées par rapport à 2024, mais déjà une légère baisse de 1,5 % des excursionnistes, ces visiteurs qui ne dorment pas sur place.” La seconde quinzaine de juillet, en revanche, s’est nettement dégradée : “Nous enregistrons une baisse de 3,8 % des nuitées et une chute de 12,1 % du nombre d’excursionnistes.” Un recul de la fréquentation amplifié, selon elle, par une météo instable – canicule en juin, puis beaucoup de vent – et par un déséquilibre : “Les prix sont élevés, les moyens plus faibles : la rencontre ne se fait pas.” Elle note également une hausse marquée des réservations de dernière minute, “encore plus importante que l’an dernier”.

 

 

“C’est catastrophique” sur tout le littoral héraultais

 

Le constat est unanime et ne concerne pas que Sète mais tout le littoral héraultais, assure Jacques Mestre, président de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie du département (UMIH). “C’est catastrophique, on a une baisse de 20 à 25% partout, sauf pour les campings qui s’en tirent bien, même s’il y a moins de monde”, assure le professionnel qui met ces mauvais résultats sur le dos du pouvoir d’achat.

“Je demande aux politiques de se remettre en question, c’est l’argent des professionnels qui est mis en jeu. Il faut des animations, moins de taxes, on est trop cher”, estime le professionnel, qui compare la France au marché espagnol et ses prix plus attractifs. Un ralentissement observé sur tout le littoral méditerranéen et atlantique.

 

 

Moins 5% de fréquentation touristique à Agde

 

La ville d’Agde a l’habitude de passer de 30 000 habitants à près de 300 000 pendant l’été. Et pourtant, elle n’est pas épargnée par ce début de saison apathique. “On est sur un mois de juillet qui est moins bon que l’an dernier. En volume de nuitées, on est à peu près à moins 5% de fréquentation par rapport à l’été 2024 qui était exceptionnel”, observe Hugo Alvarez, directeur de l’office de tourisme d’Agde. Il constate que les réalités sont différentes entre les hôteliers et les campings, moins en crise. “Les gens réservent des meublés plutôt que des hôtels”, note-t-il, afin de pouvoir se faire à manger sur place sans avoir à aller au restaurant.

Car c’est bien la restauration qui est la variable d’ajustement quand le budget des vacanciers diminue. “La prime va à l’effort ou à l’adaptation : tous ceux qui ont modifié les prix, ajouté de la visibilité numérique, de l’agilité ou des formules s’en sortent mieux”, conseille Jérôme Arnaud, le directeur de l’office de tourisme de la Grande-Motte. Même s’il considère que la profession est de toute façon “prise dans un étau létal avec l’augmentation des charges et la diminution du budget des vacanciers”.

Contrairement à la restauration, les loisirs s’en sortent plutôt bien selon Jérôme Arnaud. “C’est intrinsèquement lié aux vacances. S’ils ne font pas du jet ski, ils feront des activités moins chères comme le paddle. Les loisirs sont plus vulnérables à la météo qu’au budget des vacances”, constate-t-il.

Il a tout de même relevé un mois de juillet “en demi-teinte” avec un recul de 5 à 6% du taux d’occupation des logements et de 10 à 15% de la consommation. “Nous avons eu de très bons mois de mai et juin avec une hausse de 10% pour les hébergements et 20% pour les loisirs, notamment grâce aux ponts”, analyse-t-il. “Une partie des Français a déclenché des jours de vacances et un budget pour les grands ponts donc ça donne un mois de juillet plus mou.”

Dans les coulisses de la douzaine d’hôtels de La Grande-Motte, Jérôme Arnaud observe un comportement de plus en plus habituel chez les clients qui change la façon de travailler des professionnels. “Tous les hôtels s’adapte au jour le jour. Ils avaient vingt à trente chambres disponibles le matin mais ils n’en avaient plus que sept ou huit de libres le soir – au lieu de deux ou trois habituellement. Donc il y a bien eu un manque d’occupation mais il faut en conclure que les clients réservent à la dernière minute tous les jours”. Les seuls établissements qui ont échappé à cette nouvelle règle sont les campings qui étaient complets et réservés depuis trois mois.

 

 

“Un ralentissement qui peut être vite rattrapé”

 

Il n’est pourtant pas inquiet par ces chiffres décevants. “La Grande-Motte a un tourisme de février à décembre donc si elle ne fait pas un bon mois de juillet, ce n’est pas grave, on est moins dépendant de la haute saison.”

Un optimisme que partage Tiphaine Collet, dans le bassin de Thau. Selon elle, “le mois de juillet est depuis plusieurs années en retrait par rapport à août, notamment à cause du calendrier scolaire. Ce n’est pas nouveau, mais cela se confirme. Heureusement, depuis quelques années, septembre confirme sa force”.

A Agde aussi, on mise sur la suite de la saison. “C’est un ralentissement qui peut être très vite rattrapé”, ambitionne Hugo Alvarez, qui a déjà prévu des actions de communication pour les clientèles françaises dans l’espoir d’attirer des réservations de dernière minute au mois d’août. “On va travailler ensuite avec les professionnels sur l’international pour le mois de septembre”, explique le directeur de l’office de tourisme qui espère toujours avoir “un bon bilan global sur l’été”. Verdict à l’automne.

(Source : magazine Hérault-Tribune)

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