Francis Daspe et Sylvie Ventura-Cid, qui était la suppléante du premier dans la 1re circonscription des P-O, lors des élections législatives de juin 2024.

 

 

-“Dans le cadre de la campagne de dénigrement permanente à l’encontre de La France Insoumise, une petite musique de fond est complaisamment véhiculée. Elle voudrait faire croire qu’un candidat LFI serait incapable de rassembler, notamment au second tour, parce que forcément trop clivant. Il convient de tordre le cou à cette ineptie. Les dernières législatives dans les Pyrénées-Orientales peuvent y contribuer, certes modestement, mais tout aussi indiscutablement

 

Dans la première circonscription des Pyrénées-Orientales, j’étais un candidat (en 2002 et en 2024) particulièrement bien identifié comme Insoumis. Pas le moindre doute là-dessus. Dans la quatrième circonscription, en 2024 uniquement, Julien Baraillé était également bien identifié, mais comme socialiste, en raison entre autres de ses fonctions de secrétaire départemental du Parti Socialiste ou encore d’élu au Conseil régional Occitanie sur les listes de Carole Delga.

 

Comparaison des premiers tours 2022 et 2024

 

 

Commençons par établir une comparaison entre le 1° tour de 2022 et celui de 2024 pour ces deux circonscriptions. Dans la 1re circonscription, j’étais donc candidat de l’union NUPES (Nouvelle Union populaire écologique sociale) en 2022, puis de celle du NFP (Nouveau Front Populaire) en 2024. Les deux fois, il n’y avait pas, face à moi, d’autres candidats du périmètre potentiel du rassemblement de la gauche. Entre les deux élections, j’augmente de 1,85% (passant de 23,63% à 25,48%). Le gain résultant du passage de la NUPES au NFP est modeste mais bien réel.

Dans la 4e circonscription, en 2022, il y avait le candidat du rassemblement de la NUPES, l’Insoumis Jérôme Pous qui obtint 20,79%, mais aussi un candidat dissident refusant l’union de la NUPES (dans la logique des amis de Carole Delga), et pas des moindres, puisque secrétaire départemental du PS (donc le prédécesseur de Julien Baraillé) et vice-président du Conseil départemental, Alexandre Reynal. Il obtint 9,55%. Soit un total de 30,34% pour le périmètre potentiel de la gauche. En 2024, Julien Baraillé était le candidat unique du rassemblement du NFP (les Insoumis ayant su faire preuve d’abnégation pour laisser la place libre conformément à l’accord national). Julien Baraillé récolta en 2024 au titre du NFP 25,92% des suffrages.

Julien Baraillé ne retrouva par conséquent pas le total potentiel, perdant même 4,39%. A ce stade de la réflexion, il est important de noter qu’il fut un candidat loyal et intègre : sa personne se saurait être en cause, ni son attitude. L’analyse doit être purement structurelle et politique. On peut relever une drôle de capacité à rassembler pour un candidat appartenant à une formation politique censée le faire spontanément, largement et quasi exclusivement… A sa décharge, convenons qu’une partie des votes des dissidents “Delgaïstes” de 2022 (comme toujours et partout par ailleurs) ne sont pas automatiquement des voix de gauche, mais sont davantage compatibles avec le macronisme.

Pourtant la 4e circonscription possédait un socle de gauche supérieur à celui de la 1re circonscription (confirmé par l’histoire de la 4e circonscription souvent restée à gauche, conservée par le socialiste Henri Sicre même quand la gauche était en débandade comme en 1993 et en 2002). LE PS pensait même avoir roulé La France Insoumise dans la farine en 2024 en récupérant cette circonscription historiquement et culturellement de gauche, avec de nombreux maires et élus locaux socialistes ou socialisants… Là aussi, il est utile de rappeler le soutien et l’implication des militants Insoumis dans une campagne active, prouvant une fois de plus leur abnégation.

 

Comparaison entre le premier et de second tour de 2024

 

L’examen de l’évolution des résultats entre les deux tours des législatives de 2024 est là aussi riche d’enseignements. Dans la circonscription 1, j’obtiens 42,42%, en hausse de 16,94%. Julien Baraillé obtient dans la sienne 41,86%, en hausse de 15,91%. Soit un score final inférieur en pourcentage, avec un écart en ma faveur de 0,56%. Mais aussi avec une différence en termes d’augmentation entre les deux tours de l’ordre de 1,03%, ce qui est sensé manifester la pure capacité de rassemblement.

Ce n’est pas si mal pour un candidat supposé être clivant, incapable de rassembler au 2e tour, puisque appartenant à La France Insoumise. Et qui plus est, un candidat extrêmement clivant, aussi bien pour le premier tour que pour le second : il conserva la photo de Jean-Luc Mélenchon sur son matériel de campagne, dans le coin gauche au bas des tracts et des affiches. Et ce malgré les nombreuses sollicitations et objurgations pour l’inciter à l’enlever, au motif que Jean-Luc Mélenchon serait un boulet, un repoussoir, etc. Il serait peut-être amusant de faire la liste de celles et ceux qui m’ont demandé, enjoint, exigé, supplié, mis en demeure, et d’en consigner les arguments ou les prétextes utilisés…

 

Misère du front républicain du vieux monde

 

Encore une fois, ce n’est pas si mal que cela pour un candidat qui de surcroît ne bénéficia pas entre les deux tours du front républicain contre la candidate d’extrême droite de la part du candidat macroniste éliminé.

En effet, Christophe Euzet (honte à lui) préféra renvoyer dos-à-dos l’Insoumis du NFP et la députée sortante du Rassemblement National, optant sans doute pour le vote blanc (il était cocasse de constater que la candidate d’extrême droite se nommait Sophie … Blanc). Quiproquo sans aucun doute involontaire, tellement il était déconfit et bouleversé de son piètre résultat, au point d’en oublier de renvoyer ses comptes de campagnes à temps.

Le candidat socialiste de la 4e circonscription lui obtint le soutien (inconditionnel) de la candidate macroniste arrivée en 3e position, et elle aussi éliminée. Malgré ce soutien, Julien Baraillé rassembla moins que moi au second tour. Cette réalité montre à quel point le front républicain du vieux monde est usé, si peu opératoire et propulsif. A moins de considérer que le véritable boulet est d’être soutenu par des macronistes, ce qui constitue une hypothèse à ne pas écarter d’emblée… En tout cas, certainement pas de l’être par Jean-Luc Mélenchon, lui qui a relevé le drapeau de gauche, que d’autres avaient jeté à bas, et réintroduit dans notre camp la perspective majoritaire, que les mêmes autres avaient dilapidée.

 

En finir avec les fables mensongères

 

Cet exemple est modeste. Mais ses enseignements ne doivent pas pour autant être négligés. La politique n’est certes pas exclusivement de l’arithmétique, moi qui passe mon temps à affirmer qu’en politique un plus un ne font jamais deux. Faute de dynamique, cela fait même moins qu’un. Mais en créant une dynamique et en disposant d’une résonance, cela fait bien plus que deux. Les campagnes présidentielles de Jean-Luc Mélenchon en témoignent si besoin était.

L’écart est en réalité encore plus fort en termes de dynamiques. Toujours est-il qu’il faut en finir avec les fables de l’Insoumis trop clivant qui ne pourrait pas rassembler au second tour. C’est totalement faux. Cet exemple contribue à le montrer. L’Insoumis rassemble davantage au premier tour, mais aussi au second tour : il est davantage en dynamique. Le rassemblement de la gauche pour espérer gagner doit s’appuyer sur ses atouts avérés et ses forces motrices. Il est suicidaire de commencer par les dénigrer par d’odieuses campagnes de bashing qui ravissent nos adversaires et nos ennemis. Sans quoi nos prétendus partenaires changent mécaniquement de catégorie et de camp…”.

*Francis Daspe, animateur de La France Insoumise