(Capture d’écran CNews – Vendredi 21 janvier 2022)

 

Louis Privat, fondateur et directeur du restaurant Les Grands Buffets à Narbonne, dans le département voisin de l’Aude, a décidé d’augmenter ses salariés de 30%. Il était interviewé ce vendredi matin par la rédaction de la chaine de télévision d’info en continu CNews.

 

Il a expliqué, détaillé, les raisons de cette décision qui, espérons le, fera tache d’huile sous le soleil du Roussillon, sur le littoral du Pays catalan en particulier. Car si, dès à présent, la profession – cafés, hôtels et restaurants – ne se remet pas en cause, justement en augmentant les salaires conséquemment, nombre d’établissements pourraient, dès le printemps  qui vient, ne pas pouvoir ouvrir pour cause d’absence de main d’oeuvre...

Christophe, Dylan, Emma, Kassim, Kévin, Lucas, Manon et Younès. Leur point commun ? Ils ont tous et toutes travaillé dans le secteur de la restauration (et en hôtellerie de plein air) l’été dernier, pour certains d’entre eux même depuis plusieurs étés, que ce soit à Argelès-sur-Mer, à Canet-en-Roussillon ou encore à Collioure.

Autres points communs : ce sont tous des “saisonniers”, âgés entre 22 et 28 ans ; aucun d’entre eux ne refera “la” saison dans l’établissement où il était employé en 2021, ni d’ailleurs dans un autre établissement touristique ; et leurs salaires étaient à peine supérieur de 10 à 20% au SMIC hôtelier*.

Les raisons de ce changement de cap professionnel ? “Ce sont des métiers où on est très mal payé au regard des horaires et de la pénibilité du job, surtout en haute période estivale” ; “Avec les nouvelles conditions pour bénéficier d’allocations chômage, il faut désormais avoir été salarié au moins six mois, contre quatre mois avant, or les employeurs saisonniers embauchent rarement au-delà de trois à quatre mois”

Par ailleurs, tout n’est pas à jeter dans leur expérience professionnelle et ils tiennent à le dire en reconnaissent unanimement que leur job d’été a été “particulièrement enrichissant au niveau des contacts avec la clientèle, de l’ambiance interne à l’entreprise, très formateur au niveau du travail (…)”, mais le salaire continue de faire diversion dans la conversation.

Ils dénoncent alors de la part de leurs anciens employeurs “un paternalisme qui ne résout en rien l’attractivité du métier… Si, de temps en temps on nous glisse un billet en guise de prime exceptionnelle, on nous offre l’apéro en signe de convivialité… tout cela est très sympa, mais…”.

Pour revenir au bercail de la restauration, tous estiment qu’il faudrait appliquer une hausse des salaires de l’ordre de 30% minimum… c’est exactement ce que vient d’annoncer le restaurateur narbonnais cité plus haut !

L’été dernier dans le département, une quinzaine d’établissements n’ont pu ouvrir à cause justement du manque de main d’oeuvre (et non du COVID… qui a bon dos par les temps qui courent).

L’été prochain, sans être alarmiste-extrémiste, ce chiffre pourrait être multiplié par dix dans les P-O et toucher principalement le littoral roussillonnais.

Mais du côté des employeurs saisonniers ne se pose pas uniquement le délicat problème des salaires des travailleurs, s’ajoutent : un établissement scolaire professionnel – le lycée Christian-Bourquin d’Argelès-sur-Mer – qui ne joue pas le jeu de la profession… et l’absence d’une politique touristique digne de ce nom au niveau du Conseil Départemental. Ces deux failles dans le système constituent de sérieux freins au développement de tout un secteur d’activités pourtant essentiel car majoritaire dans notre économie locale.

Il serait grand temps que les décideurs politiques et décisionnaires à la manoeuvre dans les P-O s’en rendent compte et prennent enfin le taureau par les cornes pour affronter la réalité du terrain. Car tandis que paradoxalement nombre d’hôteliers et de restaurateurs investissent grandement (à coups de centaines de milliers d’€uros) pour réhabiliter leurs établissements et les positionner à l’avant-gardisme des normes les plus strictes, qu’ils innovent pour se perfectionner sur les nouvelles thématiques exigées par la clientèle (inter)nationale… le Département66 de son côté semble incapable d’être une force de propositions pour donner du territoire une image cohérente, attractive, touristiquement s’entend, si ce n’est à fredonner quelques notes et sifflements démodés, piochés dans le refrain des congés payés. Ok Google, quelle est cette chanson ?!…

 

L.M.

 

*Concrètement, au premier niveau, le salaire brut horaire dans l’hôtellerie-restauration était à 9,98€, soit inférieur au SMIC. Après signature d’un accord avec les partenaires sociaux, il est passé à 11,01€, soit supérieur de 5% au SMIC, mais de 4% seulement après la revalorisation du salaire minimum depuis le 1er janvier 2022. Plus précisément, dans cet accord, les organisations patronales nationales et les principaux syndicats de la branche ont cosigné une proposition sur un montant moyen d’augmentation de 16,33% sur l’ensemble de la grille salariale et donc une rémunération minimum supérieure à 5% du SMIC dès le 1er niveau. La CFDT, l’un des principaux syndicats de la branche, et signataire de l’accord, a considéré le résultat des discussions comme “une avancée inédite dans le secteur” et mesurant “l’effort du patronat”, même si elle avait demandé une augmentation de 25%.

 

(Capture d’écran CNews – Vendredi 21 janvier 2022).