Ce samedi 23 mars 2024, à Perpignan, aura lieu l’inauguration d’une exposition*, réalisée par le Cercle algérianiste, intitulée ‘’60 ans après, l’histoire se répète. FLN et Hamas : mêmes méthodes, mêmes stratégies’’

 

Oui, je considère que le rapprochement entre le Hamas et le FLN s’impose. Je vais m’employer à vous en donner les raisons essentielles, que par ailleurs je développe beaucoup plus amplement dans l’essai qui sortira bientôt en France, ‘’7 Octobre, Eux ou Nous’’.

Mais juste avant, il me faut dire ’’d’où je parle’’. Je ne suis pas historien, mais un cinéaste passionné par l’histoire, notamment celle d’Algérie, où j’ai vécu jusqu’en 1993, et celle d’Israël où je vis depuis 2011.

Mes deux derniers films concernent justement ces deux pays dont par ailleurs j’ai la nationalité. ‘’Algérie, histoires à ne pas dire’’ et ‘’Israël, le voyage interdit’’ sont respectivement sortis en salles, en France, en 2008 et en 2020 (à Perpignan, en octobre 2023 pour ce dernier film en quatre parties). L’Algérie a aussitôt interdit le premier de ces films, et boycotte tout ce qui vient d’Israël.

Les quatre histoires qui composent ‘’Algérie, histoires à ne pas dire’’ sont quatre histoires de terreur pensée, organisée, et réalisée par le FLN-ALN.

La guerre d’Algérie a commencé et fini avec deux massacres de très grande envergure. Dans les deux cas, le 20 août 1955 dans la région de Philippeville – Constantine et le 5 juillet 1962 à Oran, le jour même de l’indépendance, les non-musulmans (‘’Européens’’ et Juifs) ont été pogromisés, assassinés, mutilés, violés, défoetusés, et ce en quelques heures : plus de 130 morts en 55, plus de 700 morts à Oran.

Dans mon film, le récit de ces massacres provient de témoins algériens musulmans, actifs ou passifs. Mais depuis, deux livres absolument essentiels les ont documentés : ‘’20 août 1955 dans le nord-constantinois : un tournant dans la guerre d’Algérie ?’’ de René Vétillard, et pour Oran, ‘’Le silence d’Etat’’ de JJ Jordi.

Les deux autres histoires – le terrorisme à Alger, et l’assassinat du chanteur juif de l’andalou, Raymond Leyris à Constantine – sont aussi l’illustration de la conclusion, moi qui fut un partisan de cette indépendance, qu’il m’a bien fallu admettre : ladite ‘’guerre de libération’’ avait été surtout une guerre d’épuration. Un des tueurs d’août 1955 le dit clairement : ‘’quand on a demandé pourquoi il fallait tuer les femmes et les enfants, on nous a répondu : « chez les Français, ce sont les femmes qui commandent, et quand elles verront ce qu’il s’est passé ici à El Halia, elles diront à leurs maris, allez on s’en va ».

A différentes époques, des dirigeants du FLN ont attesté que le ‘’nationalisme’’ algérien fondé que sur une pensée ethnique ne pouvait qu’exclure les non-musulmans.

S’adressant à des étudiants algériens à Paris, en 1956, Réda Malek déclare que « L’Algérie, n’est pas un manteau d’Arlequin », et Belaid Abdesslem : « Avec un million d’Européens, l’Algérie serait ingouvernable ! ».

Durant la guerre, Lakhdar Ben Tobbal : « Il n’est pas question qu’après l’indépendance, des Juifs ou des Européens soient membres d’un gouvernement algérien. » (‘’Archives du FLN’’, Mohamed Harbi, historien algérien contestataire).

Après l’indépendance, évoquant les ‘’Accords d’Evian’’, deux dirigeants du FLN nous avouent que :

‘’ « En refusant notamment la nationalité algérienne automatique pour un million d’Européens, nous avions prévenu le danger d’une Algérie bicéphale » (« La fin de la guerre d’Algérie », Casbah Ed. 1998, Ben Khedda, ex-président du GPRA en 1961-1962).

– Heureusement, le caractère sacré arabo-musulman de la nation algérienne était sauvegardé. (« Accords d’Evian » – Le Seuil, 1990, Réda Malek, 1er ministre anti-intégriste dans les années 90).

Il faudrait plus d’espace pour bien montrer que l’islam a été une source d’inspiration majeure de la ‘’révolution algérienne’’, mais pour d’autres exemples, on peut se reporter à l’ouvrage de Roger Vétillard ‘’La dimension religieuse de la guerre d’Algérie” (1954-1962). Et ce n’est pas un hasard si l’article 2 de la Constitution algérienne stipule que ‘’l’islam est religion d’Etat’’ et que la nationalité algérienne n’est accordée automatiquement qu’aux musulmans.

Pour ce qui est donc du FLN, on peut tranquillement en conclure, que son objectif, dès sa création, était une Algérie islamique indépendante sans les non-musulmans, et que pour l’atteindre, il pratiqua systématiquement un terrorisme, la plupart du temps d’une grande cruauté, visant spécifiquement les civils européens et juifs. « Nous n’empêcherons pas cette révolution arabo-islamique de s’exprimer puisque nous la jugeons juste et bienfaitrice. », confièrent Ahmed Benyahia et Boumendjel au directeur du Nouvel Obs, Jean Daniel (Cet étranger qui me ressemble – Entretiens Ed. Grasset, 2004.).

 

Examinons à présent le cas du Hamas

 

Créé en 1987, sa charte fondatrice en fait une branche des Frères musulmans, et se donne deux objectifs : à long terme reconstituer le grand Califat démantelé en 1924 par Ataturk, et à court terme, faire disparaitre Israël. Est notamment cité le hadith suivant : « L’Heure ne viendra pas jusqu’à ce que les musulmans combattent les juifs et que les musulmans les tuent ; jusqu’à ce que le juif se cache derrière un mur ou un arbre, et le mur ou l’arbre diront : Ô musulman ! Ô serviteur d’Allah! Voilà un juif derrière moi. Viens et tue-le ! ». Point donc d’équivocité pour ce qui est de la pensée et des visées. Quant aux méthodes pour les atteindre, le 7 octobre en a donné un aperçu suffisant : assassinats, viols, mutilations, seins coupés, femme enceinte défoetusé, adultes et enfants brûlés vifs, et un bébé dans un four, prise d’otages y compris d’un bébé de 9 mois.

Alors, compte tenu de ces FAITS historiques incontestables, le rapprochement commis par les auteurs de cette Exposition entre le FLN et le Hamas, est-il justifié ? Après les preuves que je viens de vous soumettre, la question est forcément rhétorique.

Et si l’on se demande d’où provient une telle similarité dans les pratiques terroristes, il faut bien convenir qu’elles ont aussi une origine commune, l’islam.

L’assassinat de 900 Juifs en âge de se raser de la tribu des Banu Qurayza, la gorge tranchée, est décrit avec moult détails dans la Sira (Biographie du prophète Mohammed), et plus sobrement dans le Coran lui-même. Plus près de nous, en 1929, le grand journaliste français Albert Londres a décrit le terrible massacre des Juifs de Hebron, scalpés, démembrés, violés (‘’Le Juif errant’’).

Massacres qui eurent lieu au même moment dans différentes villes, Jérusalem, Jaffa, Safed, et ce à l’appel du Grand Mufti de Jérusalem, Amin el Husseini qui depuis 1921 s’imposa comme le leader des Arabes de Palestine.

Alors, lire aujourd’hui dans le journal local, qu’un historien contemporain perpignanais  conteste le lien entre l’islam et le nazisme, c’est la preuve que celui-ci semble ignorer l’histoire moyen-orientale du 20e siècle. Qu’il sache que le Grand Mufti de Jérusalem, Amin el Husseini, a passé toute la seconde guerre mondiale à Berlin sous la protection d’Hitler et qu’il échappa au Tribunal de Nuremberg, exfiltré vers l’Egypte par De Gaulle.

Sachez aussi que le Moyen-Orient arabe a accueilli des centaines d’officiers nazis en cavale à qui fut confiée l’élaboration de la propagande antijuive et anti-israélienne.

Sachez enfin que les Protocoles des Sages de Sion et Mein Kampf sont des bestsellers dans le monde arabo-musulman. Il y a de nombreux ouvrages à ce sujet et un historien contemporain ne peut plus dire qu’il ne savait pas.

Je regrette donc de ne pouvoir visiter cette Exposition qui évidemment ne doit pas être très gaie. Mais refuser de voir la Réalité telle qu’elle a été ne peut que nous conduire à la revivre en pire. A bon entendeur salut ! Et merci au Cercle algérianiste pour ce jumelage d’histoires à ne pas dire.

 

Jean-Pierre Lledo (le 21 mars 2024)

*Samedi 23 mars, à 10H, salle des Libertés