Il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Il n’est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre
Le mois de juillet 2023 qui s’achève restera dans les annales comme la pire des périodes au plan de l’activité touristique à mi-bilan de la saison estivale dans les P-O, mais nos décideurs et autres décisionnaires (élus et responsables socio-professionnels du secteur touristique) continuent de nier la réalité et préfèrent, avec l’amicale complicité des médias officiels, institutionnels et propagandistes nous expliquer la main sur le coeur que le phénomène concerne toute la France. Balivernes, foutaises et autres fariboles !
Le 21 juillet, le journal L’Indépendant se risquer même à titrer : “Tourisme, l’Occitanie épargnée par la “fuite” des estivants vers le nord de la France (…). Mieux, les professionnels du tourisme envisagent déjà une saison record”… La réalité est bien évidemment toute autre.
Des hôtels, sur le littoral roussillonnais, obligés de baisser leurs tarifs en plein mois de juillet, pour “sauver les meubles” en semaine car ils n’affichent complet que les week-ends, et encore… Des campings qui ont un taux d’occupation qui oscille entre 75 et 90% (avec des exceptions qui confirment la règlent)… Des résidences (locations) dans lesquelles deux appartements sur trois sont restés volets fermés… Des restaurants qui ont supprimé le service du midi car la clientèle n’est plus là *… Etc.-etc.
Avec toujours au menu le même son de cloche, sur le terrain, chez les professionnels, mais inavoué parmi nos dirigeants roussillonnais : “On s’est tiré une balle dans le pied ! En avril, mai et juin, la surmédiatisation pendant trois mois de la sècheresse, des incendies et du manque d’eau, dans tous les médias, est inévitablement à l’origine de l’annulation de très nombreuses réservations dans nos différents types d’hébergement. Aucun de nos grands spécialistes locaux n’a osé contester l’arrêté préfectoral portant restriction d’eau**… “.
Loin de nous l’idée ou l’envie de brosser LE tableau du catastrophisme ambiant, mais simplement de dire les choses telles qu’elles sont, les faits et uniquement les faits. Pour le reste, chacun sait qu’on peut faire dire aux chiffres ce que l’on veut, selon le côté où l’on se place – c’est la fameuse formule du verre à moitié vide ou à moitié plein -, que derrière toute statistique journalistique (et son cortège de nuances d’ambiguïté et alambiquées), il faut savoir “lire entre les lignes”… ce qui n’est pas à la portée de n’importe qui.
Vous verrez, parce que aujourd’hui ils n’ont plus d’autre choix que de voir les choses en face, d’apprécier la réalité remonter du terrain, la Vérité… vous lirez, dans les interviews des uns et des autres, surtout de l’Autre, pour établir ce premier bilan estival sur le sol roussillonnais, on vous expliquera, ils nous expliqueront que “c’est pareil partout en France” – ce qui est évidemment faux il suffit de voir le boom de la fréquentation sur une large partie de la façade atlantique -, que “l’inflation est la principale responsable” (trop facile pour analyser la tendance), que “les émeutes ont effrayé la clientèle étrangère”, que “la canicule était trop chaude !”… Que nenni !
Nos décideurs et décisionnaires locaux (et nos plumitifs) seraient donc détenteurs d’un savoir profond et mystérieux – “les secrets du langage moderne” avait ironisé Jean Dutourd*** en son époque -, pour réussir à nous la faire à l’envers et, ainsi, éviter soigneusement de porter un autre regard sur la situation telle qu’elle est réellement. Plutôt que de distiller des propos romanesques, hasardeux, voire abracadabrantesques, ils feraient mieux de se concentrer sur le fonds, afin de participer à un avenir plus heureux pour notre territoire, en menant une réflexion basée sur une forte activité intellectuelle, par exemple, et penser un Tourisme autrement.
L.M.
*Les difficultés liés au recrutement des employés saisonniers est aussi un facteur aggravant.
**Contester par exemple le fait que les piscines sont libres d’accès dans les campings… mais pas dans les résidences de vacances ! Où les locations saisonnières se sont littéralement effondrées à cause de cette absurdité.
***Jean Dutourd (1920 – 2011), journaliste, écrivain, membre de l’Académie française. Résistant et évadé à deux reprises, il avait commencé sa carrière après-guerre dans les journaux.