C’est comme retraité de la viticulture que je prends la plume aujourd’hui. Retraité vigneron, mais aussi ancien militant du MODEF* même si je suis toujours adhérent de ce syndicat à vocation agricole. Je prends la parole publiquement, car je pense que le monde de la ruralité a besoin de tous ses fils
Oui, la situation est grave. Très grave ! C’est, au-delà d’une économie, une culture qui est en danger. La culture de la lutte entre-autre, la lutte de tout un peuple de la terre pour vivre.
1907 avec Argeliers, mais aussi Montredon en 1976, ou des hommes sont morts à cause de la non prise en compte par les gouvernants de l’époque, de la souffrance d’un peuple qui ne voulait pas subir le renoncement, le fatalisme. Un peuple qui voulait vivre dignement !
Qu’en est-il aujourd’hui ?
Les évènements de ras-le-bol de l’hiver dernier, perpétrés par le monde agricole, ceux qui s’annoncent en ce début d’automne, montrent, avant toute chose, que des hommes, des femmes, des enfants sont en danger, qu’ils souffrent.
Insouciance de ceux qui gouvernent ? Non ! L’incompétence, direz-vous ? Pas plus ! Volonté de soumettre un peuple aux exigences du capital ? Oui !
Je ne vais pas écrire des lignes et encore des lignes pour faire cette dernière démonstration. Je considère que ce n’est pas à moi de le faire, mais bien aux partis politiques qui malheureusement, il faut bien le dire, ne sont plus sur le terrain, ne vivent plus dans les rues de nos villages pour en connaître les fines réalités.
Aujourd’hui, nos cités se réveillent le matin avec une seule pensée flottant au-dessus des toits, des écoles, des mairies, des églises. Des faitages de ce qui reste de nos coopératives. Une seule pensée, dis-je ! Celle de savoir de quoi demain sera fait. Celle de savoir si demain encore, nous pourrons nous acheminer vers le coin de la rue pour acheter le pain quotidien. Si le matin, à l’heure du chant du coq, nous pourrons boire le café sur le bord du zinc. Si nous pourrons aller chercher la presse et le paquet de tabac pour les fumeurs, au kiosque sur le bord de l’avenue.
En vérité, c’est l’angoisse qui serre les têtes, les estomacs. L’angoisse qui vrille les muscles, jusqu’à gêner les simples mouvements pour se déplacer, tourner les pages du journal.
Que faut-il faire ?
Vous le savez tous aussi bien que moi sinon mieux. Il faut unir toutes les volontés. Il faut rassembler toutes celles et ceux qui veulent vivre du fruit de leur travail de la terre, de l’usine, du bureau. Il faut unir, prendre en compte toutes les différences pour être encore plus forts face à l’adversité. Les différences, en lieu et place de diviser, sont une véritable richesse. Elles doivent permettre d’avancer dans la même direction pour obtenir des résultats communs, pour le bien du plus grand nombre.
Dans cette richesse bien comprise, dans cette situation de détresse du monde agricole, les élus de proximité ont un rôle dirigeant à mettre en activité.
Ils devraient occuper la première place, prendre la tête, en consultation avec les dirigeants du monde rural, de toutes les revendications qui vont, inéluctablement naître. Ils prendraient ainsi, toutes leurs responsabilités pour éviter un embrasement qui pourrait conduire à des situations de malheurs.
Joseph Jourda
*MODEF = Mouvement de défense des exploitants familiaux