(Vu sur la Toile)
Commission d’enquête TNT : Xavier Niel balance sur TF1, M6 et l’ARCOM
(Article de Par Olivier Ubertalli – Rédaction hebdomadaire Le Point)
Le Point.- Magnat des télécoms et des médias, le fondateur de Free et actionnaire du Monde, du Nouvel Obs, de Télérama et Nice-Matin, Xavier Niel, a le sens de la formule. Candidat malheureux à la reprise du canal 6 l’année dernière, il en a fait profiter les députés français le 21 mars, lors de son audition devant la commission d’enquête de l’Assemblée nationale sur le renouvellement des fréquences de la télévision numérique terrestre (TNT). Il a en particulier été très critique sur l’ARCOM (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique), TF1 et M6. Morceaux choisis.
La « pseudo-compétition » de l’ARCOM
Sur l’attribution de la fréquence 6 au groupe M6, au détriment du projet Six de Xavier Niel : « L’ARCOM a flippé. Elle a eu peur de la nouveauté. Elle a eu peur du dialogue et surtout de la compétition. Pourtant, il ne faut pas avoir peur de la compétition. Quand on est venus dans les télécoms, cela a rendu des dizaines de milliards d’euros aux Français. L’intérêt du téléspectateur est d’avoir de la nouveauté, de l’innovation, et de permettre à des gens nouveaux d’accéder et d’entrer. Cette procédure n’a jamais été pensée que comme un renouvellement de fréquences. Cela a toujours été pensé pour garder les cinq mêmes acteurs de manière historique et ne pas permettre la compétition. Pourtant, la compétition, c’est sain. Si on veut du renouveau, il faut mieux organiser les conditions d’accès des nouveaux entrants. »
Sur une éventuelle candidature pour certaines de la quinzaine de licences TNT en jeu en 2024 et 2025 (C8, W9 TMC, TFX, NRJ12, LCI, Paris Première, BFMTV, Gulli, CNews) : « Pour pouvoir exister, il faut une des six premières chaînes ou un nombre significatif de chaînes TNT afin d’avoir une masse critique. [?] Aujourd’hui, on n’est pas du tout sûrs de déposer un dossier dans le cadre de cet appel d’offres. [?] On comprend que l’ARCOM nous dit ? Venez !?, ça crée une pseudo-compétition. Mais les conditions qui sont les mêmes que pour le dernier appel d’offres font que nous sommes dans le renouvellement automatique. On peut se revoir dans un an, toutes les chaînes seront renouvelées telles quelles. »
Et le patron de Free d’affirmer avec ironie : « Qu’est-ce qu’on va perdre du temps et de l’argent pour au bout se prendre une baffe ? On peut aimer perdre, mais quand même ! ».
TF1, groupe « consanguin » au pouvoir
Répondant au député Insoumis Aurélien Saintoul sur l’influence de TF1 et sa proximité du pouvoir, Xavier Niel s’attaque à l’un de ses plus vieux ennemis, Martin Bouygues, propriétaire via le groupe Bouygues de la Une : « Ce sont des compliments pour Martin Bouygues car il a une très bonne gestion éditoriale de ses chaînes et cela n’est pas la mienne. [?] Regardez ses chaînes. Ce sont des chaînes progouvernementales, quel que soit le gouvernement. Cela peut exister dans d’autres pays. Je ne sais même pas s’il y a des interventions. Ce sont des chaînes par essence qui vont être toujours du côté du fort, du pouvoir, parce que, potentiellement, elles vont pouvoir obtenir des intérêts ou des avantages. C’est leur modèle. Personne n’est dupe de cela. Ce qui fait que, sur l’information, il y a d’autres informations sur les réseaux et sur d’autres types de chaînes. C’est consanguin à ce qu’elles font et les raisons pour lesquelles elles existent. »
Aurélien Saintoul (LFI) le relance en arguant que TF1 est au service de ses actionnaires : « Je n’ai pas dit au service de leurs actionnaires, mais des dirigeants d’un pays. C’est une activité hyperrégulée, ils savent avec qui ils doivent en découdre. »
M6 « fait de l’argent, pas toujours dans l’intérêt du téléspectateur »
Au sujet de M6, et de la politique menée par Nicolas de Tavernost, qui quittera ses fonctions de président du groupe le 23 avril prochain, Xavier Niel ne se montre pas tendre, revenant encore une fois sur son projet Six : « Mon projet était simple : c’était de faire passer les gens avant l’argent. Aujourd’hui, si vous regardez M6, vous avez un taux de rentabilité à côté duquel le secteur du luxe devrait rougir. M6 est la chaîne la plus rentable d’Europe. Ils ont clairement choisi leur combat : faire de l’argent, peut-être pas toujours l’intérêt principal du téléspectateur. [?] Si vous prenez M6, vous avez une chaîne dont l’audience baisse, mais pas les profits. Je suis un capitaliste, cela ne me choque pas par essence. Seulement, on parle d’une fréquence dans le domaine public. Si l’audience baisse en général, c’est parce que les programmes intéressent moins, c’est parce que ce qui est produit n’est pas de qualité. Quel est le seul secret pour avoir une audience qui baisse et des profits qui montent ? C’est simple : produire moins cher, maximaliser la diffusion d’écrans publicitaires, chercher des publics de cible et non plus des publics larges. Des recettes qui ne sont pas dans l’intérêt direct du téléspectateur. [?] Je suis jaloux de M6, une chaîne incroyable qui fait des profits. C’est un joyau. »
(Source hebdomadaire Le Point)