Elus, éditorialistes, sondeurs, décideurs, historiens, dirigeants de partis politiques et/ ou associatifs… Qu’ils soient à Paris ou à Perpignan, à Toulouse ou à Montpellier, ils sont pathétiques, tellement leurs discours, leurs réactions, leurs commentaires, leurs analyses, leurs paroles, scrutin après scrutin, en mode tragique ou comique, font d’eux des bouffons d’une époque qui leur glisse entre les urnes.

Oui, ils n’ont rien compris au vote Front National. Oui, ils n’ont rien compris au film de la Vie qui s’écoule quotidiennement. Ils sont dans un théâtre. Dans leur théâtre. Entre fleurs du mal et fleurs bleues. Entre fleurs artificielles et fleurs de Lotus. Entre Place Vendôme et Adèle. Entre mets iconiques et rasage du futur. Entre gabegie et privilèges. Entre statuts et statues…

Les gens souffrent, les gens en ont marre, les gens n’en peuvent plus, les gens ont peur du lendemain, les gens n’ont plus d’espoir, mais eux ils continuent de (sur)vivre comme si de rien était.

Ce matin, un élu de la Salanque s’inquiétait à la Radio du score pharaonesque du FN dans son village : “rendez-vous compte, plus de 50% pour Louis Aliot !, alors qu’il ne s’est pas volé un seul autoradio dans la commune cette année…”.

En Conflent, sous le soleil radieux et légendaire du Roussillon, un autre maire de s’étonner ainsi : “pas un seul immigré de recensé chez nous, et pourtant le Front National arrive en tête. C’est incroyable. On n’y comprend plus rien”.

Ces r̩actions, ce lundi 7 d̩cembre 2015, au lendemain du 1er tour des ̩lections r̩gionales qui ont vu le FN arriver en t̻te Рparfois loin devant Рdans la moiti̩ des r̩gions, sont communes, sur le territoire du d̩partement des Pyr̩n̩es-Orientales.

Mais ces élus, visiblement aveuglés par des conversations de bistro, se sont-ils au moins une fois posés les vraies questions pour analyser ce fameux vote FN ? Savent-ils combien de nos aînés, dans leurs communes, vivent avec à peine 700€ par mois, alors qu’ils ont trimé pendant plus de 40 ans ? Combien de jeunes se morfondent, toujours dans leurs villages, dans leurs quartiers, à espérer décrocher un premier emploi (même pour une durée limitée) ? Combien d’agriculteurs, d’artisans, ont peine à boucler leurs fins de mois à cause d’une pression fiscale devenue insupportable ? Etc.-etc.

Alors, nous faire croire aujourd’hui que ceux qui votent FN sont naturellement des fachos, des gens qui ont peur de l’immigration, qui ont peur des attentats, qui se sentent en insécurité permanente, qui rejettent l’autre pour sa couleur de peau ou sa religion… Tout cela est bien irréaliste, ou alors depuis hier : un Français sur trois qui est allé voter est un imbécile, un abruti, un raciste, un con… “Moins on est instruit, plus on vote FN”, titrait L’Express en 2012… Quel mépris pour les plus démunis, les accidentés de la vie, les exclus (…), dont nos encore-dirigeants et donneurs de leçons seraient mieux inspirés de s’occuper avant de s’engager dans la biodiversité des paysages, les circulations douces… et les paquets neutres de cigarettes. On a même appris récemment, alors que l’association Les Restos du CÅ“ur prospère, que dans sa générosité le Conseil Régional sortant socialiste d’Ile-de-France avait versé 300 000€ pour la construction d’une piste cyclable à Santiago-du-Chili… et 89 7127€ pour créer une application smartphone dans les favelas de Rio-de-Janeiro, au Brésil. Tout cela nous réjouit, bien sûr.

S.B.