Barbara NAVI “BEAUTY I’VE ALWAYS MISSED” jusqu’au 28 janvier 2023

Artistes invités : Corine Borgnet · Damien Cadio · Nicolas Darrot, Mathieu Dufois · Karine Hoffman · Léa Le Bricomte Éric Manigaud · Filip Mirazovic · Abel Pradalié

Du mardi au vendredi de 14H à 18H
Samedi de 10H à 18H
(Dimanche et lundi fermé)

 

CAC Àcentmètresducentredumonde
3, avenue de Grande Bretagne – 66000 PERPIGNAN
www.acentmetresducentredumonde.com

 

La beauté a quelques fois traversé nos vies comme un orage soudain. Il nous a semblé alors que les mots du langage se montraient impuissants à restituer entièrement ce que notre âme ressentait, que l’intensité de cette expérience ne s’acclimatait point aux usages et syntagmes ordinaires de la langue. Cette incise dans le phrasé du monde était pourtant suffisamment puissante pour que nous nous sentions requis d’en témoigner. Mais comment ? L’éclat fugace de l’apparition et son immédiate révocation donnaient déjà à cette rencontre des airs de rendez-vous manqué.

Beauty I’ve Always Missed est une exclamation résumant l’extrême précarité de cette vision qui a alors ébloui notre existence.

Barbara Navi en a puisé la formule dans la chanson Nights in White Satins (The Moody Blues, 1967) dont les stances nostalgiques célèbrent un amour d’antan. Paradoxale formule qui combine le regret mélancolique d’une perte et l’éloge incantatoire qui ranime et soutient l’existence de la beauté disparue.
De quoi est-elle alors la mystérieuse invocation ? Du désir d’abord dont l’étymologie latine rappelle qu’il renvoie à l’expérience des augures et des marins scrutant le ciel à l’affût des étoiles. Ne dit-on pas que tout désir est la nostalgie de l’étoile qui manque ? Dans desiderare, c’est sidus qui émerge en premier, vocable qui a donné le mot sidération en français. Desiderare : être en proie à la sidération devant l’emplacement de ce qui n’existe qu’à manquer.

Que la beauté soit une figure de l’absence, nombreux sont les mythes et les poèmes qui en posent l’insolite axiome, à commencer par celui dont Pline l’ancien nous a légué le récit à travers l’histoire de la fille du potier Butadès.

L’art peut-il se soutenir de la nostalgie des étoiles, tenir le cap de l’absence sans verser dans une conjuration magique ? A ces questions, l’exposition proposée par la peintre semble répondre par l’affirmative, à condition de comprendre que l’affleurement de l’étrange est alors une incidence possible de ce choix poétique.

Un postulat implicite de l’exposition Beauty I’ve Always Missed est qu’il existe un lien de parenté obscure entre la beauté et l’étrangeté, que ce lien a intimement partie liée avec la puissance sidérante de l’absence. Ce leitmotiv constant traverse et nourrit l’œuvre pictural que poursuit Barbara Navi depuis une vingtaine d’années. Il semble aussi avoir présidé à la sélection des œuvres de ses amis artistes qui prendront part à l’exposition.

Dans les Notes nouvelles sur Edgar Poe, Baudelaire écrivait : « L’étrangeté est le condiment nécessaire de toute beauté. » Son aphorisme pourrait servir d’incipit à l’exposition Beauty I’ve Always Missed.

Babak