La pénurie d’eau dans notre département et singulièrement sur la commune d’Argelès-sur-Mer a suscité de nombreux débats, lesquels ont conduit à une série de mesures dont on peine à cerner les attendus si l’on en juge par les conséquences du dispositif réglementaire adopté par l’autorité préfectorale
En effet, si le fondement du statut de territoire en détresse hydrique est indiscutable, il n’en va pas de même quant à l’efficacité et à l’équité des mesures prises par le préfet pour limiter l’aggravation de la situation de notre commune.
Deux composantes majeures de l’arrêté préfectoral suscitent principalement nos commentaires. Premièrement, celle relative à l’interdiction des appoints dans les piscines privées et deuxièmement, celle relative à la différenciation faite entre les mesures prises pour les campings et celles prises pour les particuliers.
A l’évidence, l’analyse « politiquement correcte » développée par les décideurs ne tient compte que du facteur économique, écartant ainsi l’idée de restreindre l’usage des piscines dans les campings. Cette analyse et les mesures qui en découlent n’en sont pas moins porteuses d’une certaine injustice à l’égard des habitants d’Argelès-sur-Mer et ce pour plusieurs raisons.
Concernant l’interdiction des appoints, sur un plan technique, de nombreux spécialistes s’accordent à dire que faute d’appoints, la stagnation d’eau dans les piscines entrainera inévitablement une surconsommation liée à l’obligation sanitaire du remplacement à terme de tout le volume d’eau et ce dès les restrictions levées. Les piscinistes estiment que l’impact de cette surconsommation sera bien supérieur au gain du volume escompté dans le dispositif préfectoral.
Par ailleurs une analyse récente de l’EID (Entente interdépartementale pour la démoustication) souligne un risque réel de prolifération du moustique tigre avec les conséquences sanitaires que l’on connait (…).
En termes d’équité et de justice, il semble assez surprenant de restreindre l’usage des piscines de manière différenciée sur un même territoire au prétexte de l’importance économique du tourisme dans le département. Cette différenciation pourrait laisser entendre que le déficit hydrique n’est pas suffisamment alarmiste pour justifier de mesures plus généralisées. Ajoutons à cela le fait que les efforts renforcés demandés aux piscines privées concernent moins de 30% de l’ensemble du parc de piscines du territoire (donnée en volume cumulé de l’ensemble du parc).
Et enfin, s’agissant de l’accès au droit de jouir d’un élément important du « mieux vivre » reconnu comme tel dans l’usage des piscines, sommes-nous certains que le recours au seul argument économique soit de nature à justifier pleinement une telle discrimination ?
De sources concordantes, cette discrimination est vécue par une majorité d’argelésiens comme un sacrifice supplémentaire qui vient fatalement s’ajouter aux inconvénients qui pèsent déjà sur la population autochtone durant la saison touristique (14 à 15 de coefficient de croissance démographique), à savoir : bilan carbone, fiscalité liée au surcoût du surdimensionnement des réseaux et infrastructures, fiscalité liée au budget de fonctionnement communal, surexposition des ressources naturelles et de l’environnement (mer, montagne, torrents, sites protégés et réserves naturelles, eau potable…), disparition de l’offre locative au profit de la location saisonnière, flambée du coût de la vie, difficultés de circulation, nuisances sonores, insécurité, saturation de la médecine de ville et des urgences médicales…
Quoiqu’il en soit, si le poids de la ponction saisonnière de la ressource en eau devait s’avérer impactant au point de durcir significativement les mesures d’économies imposées aux autochtones à la rentrée prochaine, alors la goutte d’eau ferait bel et bien déborder le vase tel le reflet d’une gestion perfectible de la ressource en eau.
Face à cette éventualité nous n’aurons alors plus qu’à faire le triste constat de la double peine ainsi infligée aux habitants permanents d’Argelès.
Mais ce n’est là qu’une hypothèse.
Nous apprenons que la piscine intercommunale annonce une fermeture du 3 juillet au 3 septembre 2023. Cette décision vient indirectement accentuer le caractère discriminatoire des mesures d’économie applicables sur la commune. Dommage car cette piscine joue aussi le rôle de creuset du « vivre ensemble » entre la communauté autochtone et les touristes. Elle permet également aux grands parents d’accompagner leurs petits enfants dans un endroit surveillé et plus serein que celui des plages. Ajoutons enfin qu’elle sert aussi aux enfants des centres aérés.
Christian Munos