Alors que le département des Pyrénées-Orientales traverse un épisode de sècheresse historique, que les secteurs essentiels de l’économie locale – Agriculture & Tourisme – sont en train de le payer chèrement, et que certaines entreprises et exploitations roussillonnaises risquent de ne jamais s’en relever : la responsabilité (et l’irresponsabilité) des élus dans cette catastrophe climatique annoncée (car elle était prévisible) est “hé-naur-me” ! C’est trop facile, aujourd’hui, désormais, de s’en prendre à l’Etat…

 

Qu’ont fait nos très chers élus, issus des formations politiques traditionnelles (de droite et de gauche en passant par le centre) aux commandes depuis (au moins) quatre décennies du Département (ex Conseil Général) et d’autres collectivités territoriales et locales – mairies, intercommunalités et syndicats mixtes -, pour (nous) assurer à leurs concitoyens l’avenir de leur (in)dépendance énergétique ? Rien. Nada !

A l’époque, déjà, sous Giscard d’Estaing, de la campagne nationale assurant “Qu’en France si on n’a pas de pétrole en revanche on a des idées”… pas de bol pour nous, chez nous, dans les P-O, avec nos décideurs et dirigeants locaux nous n’avions ni l’un ni l’autre ! Pas de pétrole c’est sûr, et certain, pas d’idées non plus. “Il est sympa Untel. Il a des idées sur tout, il a surtout des idées (…)”. Coluche. Du même interprète : “Des idées, tout le monde en a. Souvent les mêmes. Ce qu’il faut, c’est savoir s’en servir”. Sans commentaire ajouté. Tellement vrai, en Pays Catalan.cherche des causes et des circonstances des incendies de forêt du département des Pyrénées-Orientales,

Dans ce pays béni des Dieux – on ne le répètera jamais assez – qu’est le département des P-O, entre Méditerranée et Pyrénées, entre eau salée et soleil à volonté, où (presque) toutes les ressources essentielles à la vie sont à portée de main, sous nos yeux, sous nos pieds, au-dessus de nos têtes, comment a-t-on pu en arriver là ?

Comment nos politiques ont-ils pu négliger, voire dans certains cas piller, un tel trésor naturel ? Les fonctions qui découlent de leurs mandats ne leur demandaient pas d’être cartomanciens ou marabouts et vaticinateurs, mais simplement visionnaires. C’est pas sorcier, non ?

Il y un demi-siècle, trente ans ou dix ans encore – voire aujourd’hui car il n’est jamais trop tard pour bien faire – nous aurions pu installer une usine de désalinisation, utiliser l’énergie solaire…

Le solaire, justement, parlons-en : il y a eu la centrale Thémis, implantée à Targasonne en 1981, sur une centaine d’hectares, au cÅ“ur d’une Cerdagne qui bénéficie de conditions météorologiques exceptionnellement favorables à l’exploitation de l’énergie solaire, avec près de 2 400 heures de soleil par an ! De 1986 à 2004, de prestigieux astrophysiciens vont s’y succéder (dans l’indifférence totale de nos gouvernants locaux) pour y étudier le rayonnement gamma cosmique… Il faut attendre 2012, pour que le Département et la Région redécouvrent son existence et s’y intéressent à nouveau, de très loin, pour redonner au site sa vocation d’origine, à savoir la recherche et le développement de nouvelles technologies permettant la production d’énergie d’origine solaire… Entre temps, deux décennies de perdues !

Nous pourrions citer encore l’exemple de Tecsol, le spécialiste indépendant de l’énergie solaire, entreprise créée en 1982 par le Rivesaltais André Joffre, que l’Europe entière qui croit au solaire nous envie ! Grâce à une équipe d’une quarantaine d’ingénieurs répartis au sein du siège à Perpignan et de huit agences régionales, Tecsol accompagne maîtres d’ouvrage publics et privés dans le déploiement de leurs projets… et ambitionne plus que jamais de rayonner dans un monde numérique. En Pays Catalan, sous le soleil du Roussillon, combien de collectivités locales et territoriales ont-elles fait appel à l’expertise de Tecsol pour les accompagner, etc. ?

Nous pourrions également prendre l’exemple du plasticien français Marc-André 2 Figueres, connu et reconnu sous les initiales MA2F, natif de Perpignan, lequel avec son Solart2 – seul et unique projet des P-O labellisé par l’UNESCO dans le cadre de l’Année internationale de la lumière et des techniques utilisant la lumière (2015) – marque sa spécialisation d’artiste dans la réalisation de cadrans solaires monumentaux (dans des espaces publics à Perpignan-Rivesaltes, Sorède ou encore Py). Ses créations sont désormais étudiées et référencées dans le monde entier, mais dans les P-O, malheureusement, on les a vite oubliées, quand on ne les cache pas ou ne les répare pas (suite à des actes de vandalisme). Incroyable, mais vrai.

A l’évidence, le département a tourné le dos au solaire. Totalement irresponsable. Et nous le payons actuellement très cher : l’éclairage public 100% électrique ne fonctionne plus la nuit, entre 23H et 5H, dans la plupart des villes des P-O ! Par mesure d’économie. Les habitants à l’année subissent ; les touristes, eux… n’en croient pas leurs yeux.

Pour l’eau, c’est hélas le même constat. Pendant des décennies, ça a été Open Bar grâce à la fonte des neiges catalanes qui ont assuré pour partie le remplissage de nos nappes phréatiques (la belle époque est révolue), de nos fleuves, etc.-etc. Alors, nos élus, insouciants, n’ont porté aucune réflexion : ni sur la gestion de l’agriculture intensive, par exemple, ni sur la surpopulation appelée de leurs vÅ“ux…

Souvenons-nous : c’était en 2008, avec le projet d’alimenter les P-O avec l’eau du Rhône, de l’est de Montpellier à Narbonne, par un prolongement du réseau exploité par la compagnie BRL (Bas-Rhône Languedoc). C’est à la demande alors de Christian Bourquin (PS), alors président du Conseil Général 66, et (presque) seul contre tous dans les P-O, que l’étude devait être complétée par une extension de l’artère littorale jusqu’au Roussillon. Le tracé reprenait celui qui avait été envisagé pour amener l’eau du Rhône jusqu’à Barcelone.

-“Ce projet avait été abandonné, notamment sous la pression des lobbies agricoles des P-O. Ceux-ci craignaient la concurrence de leurs homologues alors que l’eau était destinée à l’alimentation de la population et des secteurs industriels. Les collectivités catalanes du sud auraient pourtant financé la construction de l’artère qui, désormais, incombe aux seules collectivités françaises (…)”, rappellera le journaliste Jacques Ramon dans un remarquable article publié le 4 mars 2008 dans le magazine économique Les Echos. Les travaux devaient se terminer au plus tard en 2013. On connait la suite : Barcelone a, depuis, fait le choix d’usines de désalinisation. Qui a récemment donné lieu à une excursion à la sauce catalane d’élus des P-O, conduite par Edmond Jorda, maire de Sainte-Marie-la-Mer et président de l’Association départementale des Maires de France (AMF66)…

Au Département, à chaque cérémonie annuelle des voeux à la population, au Palais des Rois de Majorque à Perpignan, la gouvernance entame le compte à rebours avec en ligne de mire le demi-million d’habitants à atteindre. Patience, on y arrive*. Vite ! Et après ? On visera le Million ? Comme au Loto. En attendant, les équipements et les infrastructures, pour accélérer cette “Sarcellisation” à coups de pelleteuses de la plaine du Roussillon et du littoral, ne suivent plus.

Gonflés à bloc, des élus qui souvent n’ont jamais entretenu des travaux sur les réseaux – dans certaines communes la déperdition des canalisations d’eau atteint jusqu’à 30%… soit l’équivalent de milliers de piscines – osent aujourd’hui pointer du doigt la responsabilité de l’Etat, ce en réclamant la mise en place d’une enveloppe exceptionnelle pour financer leur désinvolture, pour ne pas dire à minima leurs négligences. On croit rêver !

 

L.M.

*Environ 495 000 habitants aujourd’hui.