(Vu sur la Toile)

 

Hebdomadaire Le Point.- Avant-hier, mardi 26 septembre, dans les beaux salons du Sénat qui font office de restaurant, une dizaine de sénateurs socialistes proches d’Olivier Faure déjeunaient ensemble.

Ils voulaient partager un premier repas après l’élection de certains d’entre eux, comme la numéro deux du PS Corinne Narassiguin. Mais d’autres y ont vu un autre symbole : « Ils sont venus à dix d’Ivry [siège du Parti socialiste, NDLR] pour prendre possession symboliquement du lieu. C’était la phalange ! » rigole un sénateur socialiste habitué des arcanes du palais du Luxembourg. La démonstration de force a raté : Patrick Kanner, opposant à Olivier Faure, a été réélu à la tête du groupe PS. Le sénateur du Nord a battu son rival des Landes Éric Kerrouche, proche du premier secrétaire.

La bataille des deux « K », c’était aussi une rivalité entre les pro et les anti-NUPES.

Kanner n’a jamais caché son animosité à l’encontre de l’accord signé avec les Insoumis au lendemain de la présidentielle de 2022. Il s’est opposé à Olivier Faure, artisan du mariage de raison avec LFI, le PCF et EELV, lors du congrès de Marseille, en début d’année. Le premier secrétaire a donc oeuvré pour fragiliser le sénateur du Nord. Kanner n’a d’ailleurs pas eu la partie facile pour l’emporter dans le Nord : Martine Aubry, toujours influente à Lille, a voulu imposer sur la liste Audrey Linkenheld, ce qui a conduit Martine Filleul, évincée, à présenter une liste socialiste dissidente. Kanner a malgré tout été réélu.

 

« La revanche du congrès »

Un peu partout en France, les rivaux d’Olivier Faure ont constaté que la direction du PS privilégiait souvent des candidats socialistes proches de Faure lors des accords avec les autres partis de gauche. « La direction a donné l’impression de chercher la revanche du congrès », note un proche de Kanner. Les proches d’Olivier Faure auraient ainsi roulé des mécaniques. « Plusieurs dirigeants du parti, qui sont aussi sénateurs, nous ont fait comprendre que le groupe au Sénat serait désormais à eux et qu’on devait leur obéir au doigt et à l’oeil ! » confie un sénateur.

D’autres témoignent de coups de fil passés par des cadres du PS pour voter en faveur d’Éric Kerrouche. Or les sénateurs n’aiment guère les intrusions, encore moins la pression venue de l’extérieur. « C’est Olivier Faure qui a tué Kerrouche », assure un vieux routier du palais du Luxembourg.

Avec trente-huit voix en sa faveur, contre vingt-cinq pour Éric Kerrouche, Patrick Kanner l’a emporté assez largement. Il a pu compter sur l’apport de la dizaine de sénateurs proches de Rachid Temal, un temps candidat au poste de président du groupe. Ce dernier, ancien premier secrétaire par intérim du Parti socialiste, tient à relativiser l’affrontement entre pro et anti-Nupes. « Personne n’a fait campagne avec son drapeau NUPES, au contraire : tous les candidats se présentaient sous l’étiquette PS », observe Rachid Temal.

Le très urbain Patrick Kanner n’entend pas appuyer là où ça fait mal. « Le groupe a jugé que je pouvais être consensuel pour combattre la droite avec clarté », a expliqué le sénateur du Nord au Figaro juste après sa réélection à la tête du groupe. Il ne le dit pas, mais il entend toujours s’opposer à la NUPES, avec clarté ou pas ?

(Source magazine Le Point)