Valérie Vanhulst devant son four de “BB Pizza” au Passage des saveurs, 11 boulevard de la Mer à Argelès-plage. Elle y accueille une clientèle particulièrement fidèle qui vient aussi depuis Saint-Cyprien !
L’affaire est kafkaïenne. Pour le moins. Dans la chronologie des faits, déjà , elle ne tient pas la route. En tout cas. Une restauratrice exerçant dans le Passage (municipal) des saveurs, à Argelès-plage, est quotidiennement menacée d’expulsion dans des conditions pas très catholiques. Pour le moins, vous l’allez voir…
Valérie Vanhulst tient depuis trois saisons (elle entame sa 4e) un local de vente de pizzas à emporter situé sur le boulevard de la Mer, à l’entrée du fameux Passage des saveurs, lieu-dit qui appartient à la Ville, autrefois susnommé par les habitants du quartier “Place du petit-marché”, ou “Place de la petite-poste”.
Désormais, et depuis près d’une décennie, le site abrite essentiellement des restaurants – “C ça k’sé bon”, “Thaï Siam”, “La Rouillade”, “El limon picante”, “BB Pizza” -, ainsi qu’un vigneron colliourenc (Manya-Puig-Valentin).
Les commerçants ne détiennent aucune propriété commerciale in-situ, puisque c’est la Commune qui est propriétaire, mais c’est une Convention portant occupation du domaine privé sur la commune d’Argelès-sur-mer qui régit le fonctionnement (et l’attribution des lieux).
En une poignée d’années tout juste, l’endroit est devenu très couru, tendance, grâce au dynamisme de tous ces établissements, où chaque commerçant exerce dans une parfaite ambiance, harmonie et convivialité, tous solidement unis.
La clientèle est de plus en plus nombreuse à venir s’y attabler en terrasse, loin de l’agitation bruyante du centre-plage de la station balnéaire, et pourtant situé à une centaine de mètres à peine du JOA Casino et de l’entrée – ou de la sortie selon d’où on vient et où on va – de l’emblématique allée piétonne Jules-Aroles, plus précisément du célébrissime bois de pins que nous envierait la Terre entière.
Les faits. Le 21 mars 2024, la commission Commerce de la Ville d’Argelès-sur-mer se réunit suite à un appel à candidature pour le local n°1 du Passage des saveurs. A l’issue d’un délai prescrit par la loi, Valérie Vanhulst, gérante de la SAS “Tout’saveurs” qui s’est vu attribuer le local en conseil municipal le 29 mars 2021, est informée – par téléphone ! – que sa candidature n’a pas été retenue, mais sans plus d’explication…
Comme elle ne reçoit aucune suite à cette décision qui ne lui a jamais été officiellement signifiée, par exemple pas la moindre lettre recommandée avec accusé de réception (LR-AR), elle poursuit son installation pour la saison 2024, en cours.
Mi-mai lui est remis un simple courrier dans lequel le maire, par délégation, lui confirme que sa candidature n’a pas été retenue : “Nous sommes désolés (…). Votre convention arrivant à échéance le 31 mai 2024, il faudra donc faire le nécessaire pour récupérer votre matériel et restituer les lieux au plus tard à cette date. Notre service technique va vous contacter très prochainement pour prendre rendez-vous à fin de réaliser l’état des lieux de sortie”. Un point c’est tout. “Un peu léger et cavalier comme procédé”, tempête Valérie Vanhulst.
Valérie Vanhulst est bien décidée à poursuivre son activité sur le domaine communal par l’exploitation de ce local, à vocation principale de vente de pizza à emporter. Ce malgré l’épée de Damoclès qui pèse sur ses épaules, avec notamment visites régulières de la PM et même d’un huissier.
Car à ce stade, elle ne connaîtrait toujours pas, officiellement du moins, les raisons de son éviction. Les rumeurs vont bon train : “Elle n’habiterait pas dans la commune” ; “Elle n’ouvrirait pas son commerce aux dates édictées par la Convention, à savoir du 1er juin au 30 septembre” ; “Il y aurait eu une proposition mieux disante”, etc.-etc.
Concernant d’abord le fait que Valérie Vanhulst “n’habiterait pas la commune” : ceci est extrêment grave car discriminant aux yeux de la loi. Et quand bien même : du Passage des saveurs jusqu’au Village artisanal d’été et aux marchés de plein vent hebdomadaires, tous situés sur le domaine public communal, nombre d’exposants et de commerçants ne sont pas domiciliés, ni familialement ni professionnellement, dans la commune d’Argelès-sur-mer. Cette rumeur est totalement infondée, pour ne pas dire grotesque.
Ensuite, Valérie Vanhulst et son “BB Pizza” ne respecterait pas les dates d’ouverture imposées par la Convention communale qui régit le fonctionnement du Passage des saveurs ? Aucun des restaurants précédemment cités ne reste ouvert jusqu’au 30 septembre. Dans ce cas, tous devraient être sanctionnés de la sorte ? Ridicule.
Enfin, la mieux disance. C’est un principe : c’est l’offre économiquement la plus avantageuse pour le propriétaire, elle intervient dans le cadre d’un marché public* ou, c’est plutôt le cas ici en ce qui nous concerne, du renouvellement d’un bail, quel qu’il soit. Or, il y a une coutume bien ancrée localement, qui remonte à une décision mise en place et respectée par les précédentes municipalités : à chaque renouvellement de ladite Convention (tous les trois ans en moyenne), il est demandé à l’occupant du bail en cours qui se termine s’il peut s’aligner sur l’offre la mieux disante. Ce qui parait logique avant de le mettre à la porte. Or, Valérie Vanhulst est formelle : “On ne m’a jamais dit ni le pourquoi ni le comment quitter les lieux, juste quand déguerpir une main devant une main derrière, et encore en ne respectant pas toute la procédure”, s’indigne-t-elle aujourd’hui.
Elle a décidé de ne pas en rester là et de confier l’affaire à un avocat : “Avant d’en arriver là , je suis même allée poliment et sereinement voir Monsieur le maire, Monsieur Parra, avec mon dossier sous les bras, lors de sa permanence hebdomadaire sans rendez-vous. Il m’a très bien reçu. Il a été absolument à mon écoute. Nous avons pu échanger dans les moindres détails. Je l’ai senti vraiment soucieux de connaître toute mon histoire. Seulement voilà , il m’a confié que jusqu’à cet entretien il n’avait pas été tenu au courant de cette affaire. Qu’il n’en avait pas entendu parler. Avouez que c’est fort de café, non ? Quelqu’un aurait donc pris une décision d’une telle importance sans l’en informer, alors qu’il s’agit d’un bien dont la Ville d’Argelès-sur-mer est propriétaire ?… C’est hallucinant”.
L’autre problème est que cette situation, énigmatique et très embarrassante, fait une victime collatérale : le professionnel le mieux disant qui a été retenu pour s’installer dans ce local communal commercial, et qui devait entrer en fonction dès le 1er juin courant. Il se retrouve sur la paille, pour ne pas dire “à la rue”, acteur et spectateur bien involontaire d’une programmation estivale qui lui échappe totalement… mais par la faute de qui ?
A suivre, au tribunal … ou dans le cadre d’un accord à l’amiable toujours possible.
L.M.
*Article 53 du code des marchés publics du 1er août 2006 (décret n° 2006-975 modifié).Â